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6 mai 2012 7 06 /05 /mai /2012 15:40

 

 cimetieres-de-baleines--clip-2.jpg 

  * Chemins de l'été. Carrières abandonnées. Ardoises de la maison liquide. Nomadisme de par les plaines. Camis ramaders de Catalogne. Canaïres de Provence. Trazzere de Sicile. Drumul oilor de Roumanie. Canadas de Castille. Drailles du Languedoc...

 

   Chaque jour, le plein midi, malgré l'embrun, malgré la pluie.

  Les textes apparaissent comme à une crête de chemin de randonnée.

  Ce mai assoupi qui se surprend à guetter la foule et la venue de l'été...

  Tandis qu'à la ville, des rues, des marchés, des lycéens...

   Je me souviens, Le Lavandou...Ces gens multicolores, hôtels éventrés, cuisses boursouflées, coquillages blancs, mondes du large, des nuits humides et des sexes ouverts...

  Devanture sans vitrine, un décor de sable et un café posés dans un théâtre fin de siècle...

 

  * Villégiature tranquille dans un transat du Prado. A Marseille, la drôle de mort de Rimbaud. Dans le jeu de quilles de la vie, il perd la sienne. Mort d'une jambe, perte d'un poète...

  Arthur toujours ivre sur sa dune d'olive. Harar, Roucas blanc, Lolla Touareg. Il peut écrire tous les déserts des pages, ailleurs la vraie mort...

 

   L'écriture rimbesque court sur le sein des vagues. Elle est happeuse, pressante, exigeante, sans concession : elle est la mer, dirait Rimbald le Marin, elle écrit du haut de ses épées d'écume !

 

   L'été des oiseaux sur la plage. Pattes et poitrines calcinées par le soleil. Les ailes dans le goudron du vent. La cage noire des cheveux. Quelques filles, qui détiennent la vocation du bonheur, voltigent dans leurs dentelles, dont le geste aérien est charnel. La peau se lit à la pointe d'un sein qui cogne à l'enveloppe de l'air. Un désir nu se visse dans cette rougeur à la chair de poule.

 

   Eté des arbres crachés à la mer; elle rend pourtant un jour, toujours, ses excréments d'hommes et d'objets. Au-dessus des têtes, un manège de cuivres. Une musique d'eau sur l'enclume du sable. La chaleur habite la surface des lèvres, tout à leur récitation du silence. Sculptures immobiles des corps marins. L'été referme ses demeures de noix sous une rapide voûte de bras.

  Il se tient où navigue l'écriture. Il mine le crayon de la parole...

 

   * Sale été 93 : Après le froid alpin de début juillet, après la mort de la collègue de Lettres, et les vents marins glaciaux de Collioure. Ou l'ironie du sort de Ferré parti le 14 juillet. Ainsi que Marcel Oms et sa compagne, victimes des cimetières bitumés en pays audois... Que de mauvaises nouvelles ! 

   Pour le témoignage objectif, on notera le décès de Bouygues, qui n'aura su se faire statufier : du béton que de son vivant !

   Il ne restera que la lecture de Montaigne, long labour estival et les jours rythmés par des musiques, des élans de chaleur, les vagues et les livres sur Artaud, la fête à Perpignan...

 

   * Miettes d'un été. Mots éperdus...

 

  * Après le lever brutal du matin gorgé de soleil, l'écriture se renouvelle, dans l'ombre des tuiles et des lauses...

 

  * J'apprécie, lors des matins estivaux, l'effet duveteux de l'évaporation, de la dissipation des mots nocturnes. Je l'attends, la guette, cette fuite des brumes, pour découvrir enfin les lignes du village, du paysages, les courbes de la mer. Mais la brume se change en un brouillard intense, qui monte, vite, vers les collines et, même en courant vers les hauteurs, les vignes, les tours de guet, elle monte plus rapidement que moi, la brume insoupçonnée, même en courant sur le toit du décor, je n'ai guère le temps d'apercevoir la vergue de la mer, le découpage du littoral, la cambrure de la Méditerranée, la ligne obstinée de l'horizon, l'improbable voile hasardée dans les cotons trompeurs... Il faut fendre les vapeurs de l'impossible jour pour revenir chez soi, avant l'intégrale invisibilité...

 

   La neige sur la mer est aussi insolite qu'un poil de vieillard sur un œuf d'autruche. Pourtant, c'est une si belle surprise, quand plage et mer découvrent la neige !

 

   La plage estivale est une leçon d'anatomie (déjà dit ? décrit dans ce journal intime ?)

   Pourquoi tant de gens demandent-ils si l'eau est bonne. La mer n'est pas bonne, elle n'est que fausse surface, qu'illusion de beauté : sans bonté, son humide profondeur, si angoissante pour mes petites palmes...

   Il a plu dans la nuit méditerranéenne : la mer, au matin, peut vous paraître encore plus mouillée que d'habitude...

   Le vieux fait mille contorsions pour s'enlever le maillot et se mettre un caleçon se; debout, devant la foule qui, par bonheur, ne s'inquiète que de la course d'un nuage ou de la probable venue du dauphin pèlerin de la Côte vermeille.

 

   "Commence pas à couaner !" (sic), lance la mère à son petit, effrayé à l'idée de nager...

 

   Et lui, du tac au tac : "Arrête de nager : tu vas devenir dauphin !"

   Il prit la méduse par dessous et la lança comme une bombe molle cent mètres plus loin dans un orage d'écume.

 

  * L'été, j'aime me contenter de rester dans le soleil de ma table. Au matin, écrire dans cette plongée rêveuse nourrie de cafés chauds et de l'exotisme d'un cigare, pour ramener à peine, parfois, un semblant de poésie...

 

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  • professeur de lettres, écrivain, j'ai publié plusieurs livres dans la région Languedoc-Roussillon, sur la Catalogne, Matisse, Machado, Walter Benjamin (éditions Balzac, Cap Béar, Presses littéraires, Presses du Languedoc...
  • professeur de lettres, écrivain, j'ai publié plusieurs livres dans la région Languedoc-Roussillon, sur la Catalogne, Matisse, Machado, Walter Benjamin (éditions Balzac, Cap Béar, Presses littéraires, Presses du Languedoc...

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