-Communautés libertaires en France entre 1968 et 1980
Lu sur Increvables anarchistes : "Entre 1968 et 1978, des communautés libertaires vont s'implanter un peu partout en France et, un certain nombre d'entre-elles, le font dans la région du Sud-Ouest, proche des Pyrénées. Il s'agit ici de relater les expériences qui se sont déroulées dans les Pyrénées-Orientales, l'Aude, l'Ariège et dans une moindre mesure, le Gard, l'Aveyron, la Haute-Garonne...
Pour l'essentiel elles sont rurales et se situent dans des zones de montagne frappées par l'émigration des enfants d'agriculteurs, des zones en voie de désertification.
Le qualificatif de " libertaires " que j'emploie à propos de ces communautés, se fonde en premier lieu sur le constat du rejet de la société de consommation. Il se fonde par ailleurs sur leurs modes de vie intégrant des pratiques en totale opposition avec les "politiques" institutionnalisées, y compris celles des groupes et mouvements d'extrême-gauche.
Ces communautaires refusent l'électoralisme, forme intégrée du jeu politique établi.
En fait, ces communautés se veulent et se vivent comme la concrétisation au quotidien de la lutte à mener contre le "vieux monde" : action directe, autogestion de la vie, autant de références implicites au Mouvement Libertaire. Elles désirent inscrire leur action dans une dimension de changement sociétaire. Pour ce faire, elles vont tenter de mettre en place des structures d'échanges, des réseaux, avec d'autres communautés et quelquefois même avec des organisations du mouvement libertaire : Fédération Anarchiste (FA), Confédération Nationale du Travail (CNT-F), Anarchisme et Non-Violence, etc...
En me référant à divers témoignages écrits, j'ai pu constater que certaines réserves étaient émises par les acteurs eux-mêmes concernant la dimension révolutionnaire des communautés. Ces réserves témoignent de la lucidité qu'ils manifestent quant à leur propre expérimentation. François Mainguy nous rappelle qu'à cette époque, les états-majors syndicaux, les groupuscules " gauchistes " ne semblent pas présenter d'alternative viable et concrète à une jeunesse qui veut vivre la révolution au présent. " Nous voulions TOUT " ajoute-t-il...
La foi dans la révolution qui semble imprégner le mouvement à l'origine, masque dans une certaine mesure l'ampleur de la tâche. François écrit à ce sujet " (...) mais on n'a pas pu éviter le piège du dirigisme et donc des conflits enseignants-enseignés, les tentatives de hiérarchisation étaient souvent difficiles à juguler, l'égalitarisme tant recherché sembla souvent une vertu lointaine ". Pour Michel Besson et Bernard Vidal, le manque de coordination entre les différentes expériences communautaires, malgré quelques tentatives entre 71 et 75, ainsi que l'absence de perspectives globales, retirent au mouvement sa dimension révolutionnaire.
Pour preuve, la quasi-inexistence de liens de solidarité entre les luttes sociales et le mouvement communautaire. Ces constats, nous induiraient en erreur s'ils nous conduisaient à attribuer aux seuls communautaires la responsabilité de cet état de fait. Je rappellerai ici que le mouvement communautaire a subi un isolement culturel et social, isolement entretenu et amplifié par l'attitude répressive des autorités.
Un fort " matraquage " médiatique a du reste constamment relayé cette attitude répressive. cette marginalisation imposée par le système a, de fait, annihilé toutes les tentatives de rapprochement entre communautaires et travailleurs en lutte. En 1993, j'ai réalisé les interviews d'un certain nombre d'acteurs de ces expériences.
J'en restitue ici les conclusions afin de nous aider à en comprendre les ressorts :
Dominique Barrès (Le Blasis - 31), considère que les communautaires sont passés à côté de quelque chose de grand. Pour lui, le goût de l'affrontement a gâché énormément de choses. Seul, le milieu de la non-violence a, selon lui, échappé à cette règle. " Si nous avions su nous accepter les uns et les autres, nous aurions pu réussir... " précise-t-il...
Patrick Boury (Le Planel-du-Bis - 09 ) n'a à aucun moment regretté cette expérience, bien au contraire. Elle l'a conduit très jeune (18 ans) à vivre en collectivité et a, en partie, forgé son caractère. Il pense qu'aujourd'hui, la démarche de vie communautaire, si elle existe encore, tourne autour du " vivre ensemble ", mais certainement pas avec le même idéal .
Paul Gérard (Las Carboneras - 66 ) regrette que le mouvement ait cessé trop tôt. Pour lui, au sein des communautés, la pratique a fonctionné un temps comme la validation de la théorie. Ce qui les a fait mourir, ce sont surtout les problèmes liés à la gestion des rapports sexuels. Il en veut pour preuve, les couples qui sont parvenus à surmonter ces problèmes et qui sont aujourd'hui des...néo-ruraux . A l'époque, les gens n'étaient pas préparés à de type de rapports...ajoute-t-il. Pour abonder dans son sens, je rappellerai le film " La Cécilia " qui nous narre l'histoire d'une communauté succombant aux problèmes liés à gestion de la sexualité des femmes et des hommes qui la compose.
Joseph Chioselli (mas Julia - 66 ) se réfère à des souvenirs contradictoires : quelques situations difficiles, mais aussi de chouettes moments. La communauté du " mas Julia ", Joseph la juge peu rationnelle, mais grande y est la motivation. Pour Joseph, cette motivation " semble avoir disparu aujourd'hui, ou alors...elle est devenue bassement matérielle ". Il ne se souvient pas d'un réel rejet de la part des populations environnantes. Aussi son grand regret c'est " qu'elles n'aient pu prendre forme et qu'elles n'aient pas duré plus longtemps ".
Pierre Méric (Villeneuve-du-Bosc - 09 ) pense que tout ce qu'il fait depuis, passe par la remise en question de soi et l'auto-approfondissement qui accompagne toute expérience de vie en collectivité. Il considère que la vie communautaire aide à la prise de conscience suraiguë des autres. La commune au travers du projet, de l'expérience et de l'implication profonde des individus, transforme chacun des acteurs qui la composent.
Michel Pagnoux (Le belvédère - 66 ) considère cette époque comme très heureuse, créative. Il y a de la naïveté dans la démarche des communautaires, liée à leur jeune âge, pense-t-il. " Forts de nos vingt ans et de l'enthousiasme de notre foi en nos idées, nous pensions que la seule valeur de notre exemple allait suffire pour faire basculer le monde vers un monde meilleur, de paix, d'harmonie et de prospérité... " et il ajoute, " Le grand rêve idéaliste brisé nous a renvoyé à nous-mêmes et à plus de réalisme, peut-être. Personnellement j'ai toujours autant de plaisir à vivre et à rencontrer des gens qui ont quelque chose à dire et qui n'attendent pas que Dieu ou le gouvernement leur donne les moyens de vivre... ".
Jean-Pierre Spiandor (Albières - 11) insiste sur l' inconscience des communautaires vis à vis de ce qu'ils vivent. Pour lui " les idéaux ne paraissent pas assez bien définis, comparés à d'autres communautés qui se revendiquaient de l'anarchisme, voire même des communautés religieuses ".
Gérard Lorne (Raoubots - 09) pense que " beaucoup des expériences de l'époque représentaient une mode amenée par un ras-le-bol bien réel, dès 1968 ". Les regards des acteurs nous renseignent sur certaines difficultés rencontrées : - le manque de maturité des individus, - l'absence de définition claire des projets communautaires, - le fait de ne poser qu'en de très rares occasions, les problèmes en termes " politiques "...
Des difficultés qui conduisirent le mouvement communautaire dans une impasse sociale.
Les communautaires ont rencontré d'énormes problèmes au moment de la mise en oeuvre -en acte- des pratiques théorisées.
L'exemple des communautés qui revendiquent la liberté totale, ainsi que la liberté sexuelle et, qui ont du mal à vivre cette réalité, est révélateur de cet état de fait. Ces expériences m'ont conduit à poser un certain nombre de questions.
En premier lieu, quelles ont été les raisons qui ont conduit à leur fondation ?
Concernant cette question, il convient d'insister sur le rejet de la société dite de consommation, doublé du rejet des pratiques politiques traditionnelles. Ce refus de l'institutionnalisation tendait à renvoyer dos à dos tous les appareils, y compris ceux qui se disaient révolutionnaires. Ceci explique pour partie l'absence de liaisons réelles entre les communautés libertaires et le mouvement libertaire organisé. Ceci également a, de ce fait, privé le mouvement communautaire d'un moyen sérieux de faire connaître les expériences hors des circuits marginaux où elles se déroulaient.
Les seuls cas attestés de contacts entre des expériences communautaires et des organisations libertaires (F.A., CNT, Anarchisme et Non-Violence) ont été le fait de militants ou d'ex-militants de ces organisations. Les communautés libertaires, se contentèrent de vivre la "révolution" au quotidien, souvent coupées du monde, repliées sur elles-mêmes. Cette situation affecta tout autant les relations des communautés entre elles.
Les rencontres inter-communautaires de " Frayssinous ", de " Gourgas " se firent à l'instigation de militants qui jugeaient nécessaire de mettre en place une coordination communautaire révolutionnaire, et qui ressentaient le besoin de lier, au moyen d'une solidarité soutenue, leurs expériences, aux luttes sociales qui sont menées à cette époque. La volonté de coordonner le mouvement communautaire, née de la réunion de " Gourgas " en 1972, est le fait de 34 communautés.
En second lieu, quels aspects essentiels ont émergé de leurs multiples vécus?
Il est nécessaire de préciser d'emblée que les communautés libertaires ont , dès l'origine, organisé leur vie autour de trois grandes orientations :
- La mise en pratique d'une liberté totale, y compris sexuelle, tendant à libérer les individus dans le cadre d'une vie collective ainsi que le rejet de la famille,
- La mise en commun de tous les avoirs afin de fonder un communisme financier,
- La rotation des tâches et le partage égalitaire du travail, afin de réaliser l'égalité entre les individus, femmes ou hommes. La prise en charge des enfants et de leur éducation par le collectif s'inscrit dans cette redéfinition des rôles masculins/féminins.
La pratique de la liberté sexuelle et le rejet du couple traditionnel, cela a déjà été signalé, ont été à la base de psychodrames et ont très souvent entraîné l'éclatement de la structure collective. C'est en effet des individus modelés par des siècles de morale religieuse, donc non préparés, qui ont du affronter ces situations nouvelles.
· Le communisme financier s'est pratiqué à peu près partout. La théorie du partage égalitaire a trouvé dans les communautés le cadre de sa réalisation. Pourtant, lorsqu'apparaissent des difficultés (insuffisance de production agricole ou artisanale) et que la nécessité de faire rentrer de l'argent commence à se faire sentir (travail salarié sur l'extérieur), les problèmes commencent vont se faire jour. L'abandon du communisme financier, après de deux ou trois années de vie, sanctionnera alors cet état de fait.
· La rotation des tâches s'est limitée le plus souvent aux travaux ménagers. Les rôles féminins/masculins évoluent peu dans les communautés. En revanche, la prise en charge des enfants par le collectif et les rapports père/enfant qui se nouent sont le reflet de la vie en communauté. Pour finir, ces expériences se sont-elles inscrites dans un processus logique ?
Ont-elles ouvert sur des perspectives historiques ?
Concernant les liens reliant ou non les expériences communautaires libertaires à un processus historique je pense qu'il est possible de répondre par l'affirmative. En effet, ces communautés de l'après " soixante-huit " au même titre que leurs devancières dans l'Histoire sont nées dans une période de troubles, de questionnements et de remises en cause du système et de ses valeurs dominantes.
Elles ont préfiguré une remise en cause des idéologies qui se poursuivra sous d'autres formes.
Ces expériences se sont déroulées selon des schémas historiques déjà connus, si nous nous référons aux expériences des milieux libres qui ont eu cours à la fin du 19ème siècle au Brésil, et au début du 20ème siècle en France.
Certains les ont qualifiées " d'archaïsme ", leur attribuant l'unique dimension d'un retour à un passé révolu. Il est bon de tempérer cette analyse, car les communautés libertaires de l'après " soixante-huit " mesurent d'une part la difficulté de parvenir à l'autarcie et, d'autre part, comme nous l'avons déjà signalé, les plus " militantes " d'entre elles ont ressenti la nécessité de s'intégrer à une lutte plus large, contre le système, aux côtés des travailleurs en butte à l'exploitation salariée.
Les communautés libertaires ont tracé des chemins et ouvert des perspectives historiques, modestes certes, mais bien réelles.
L'écologie, la libération des moeurs, la quête d'un bonheur simple, proche de la nature, la vie en collectivité en se passant de " responsable ", le développement des relations inter-personnelles enrichissantes, la non-violence active, sont autant de facettes des expériences communautaires qui vont être exploitées par d'autres à partir des années 70.
Le mouvement des communautés libertaires a réalisé en son sein la fusion de la contestation radicale du mode de production avec la contestation culturelle du mode de reproduction, accompagnées d'une contestation du modèle militant.
Recherche éditeur, collaborateurs et mécènes
Ecrivain en contact avec les communautés des Pyrénées-orientales, de l'Ariège, de l'Ardèche et de l'Aude, ayant écrit déjà une centaine de pages (témoignages, historique, annexes) recherche d'autres témoignages sur les communautés libertaires, artistiques et agricoles, depuis les années 1970 à 2000.
Recherche éditeur et mécènes. Contact : J.Pierre Bonnel- 06.31.69.09.32. - 04.68.55.96.39.
libertaires agricoles et artistiques en pays catalan »...
« Les communautés libertaires agricoles et artistiques en pays catalan » : un ouvrage collectif emmené par Jean-Pierre Bonnel
13 septembre 2016
Jean-Pierre Bonnel et Paul Gérard
Le vendredi 16 septembre, à 18h30, à la médiathèque d’Argelès, au village, près du cinéma Jaurès, Jean-Pierre Bonnel et Paul Gérard présenteront « Les communautés libertaires agricoles et artistiques en pays catalan (1970-2000) », un nouvel ouvrage collectif paru chez Trabucaire éditeur. L’entrée est libre.
Dans le sillage de mai 68, les années 1970 sont une formidable explosion de jeunesse, de désir, de libération. Le vieux monde craque de partout. C’est le temps rêvé des ruptures, des révoltes, des expériences.
Dans ces années-là, ils avaient 20 ans, ils voulaient échapper à la routine « métro, boulot, dodo », réagir contre le mode de production capitaliste et la société de consommation, s’associer avec d’autres pour vivre autrement et porter ensemble un projet commun libérateur. Ce fut le temps des communautés, rurales, urbaines, agricoles, artistiques et autres collectifs, d’esprit libertaire pour la plupart.
Dans ces années-là, en pays Catalan, les 40 personnes qui racontent, dans ce livre, leur expérience communautaire, ont fait ce choix. Ils ont loué des mas et des terres dans des espaces en voie de désertification. Ils y ont vécu, travaillé et mis en pratique leurs idéaux. Les Carboneras, le mas Julia, Vilalte, Montauriol, St Jean de l’Albère, Malabrac, Fontcouverte, Cailla, Opoul, le mas Planères, Canaveilles, Fillols… autant de noms qui claquent comme des symboles de liberté, de sens et d’humanité.
Ils témoignent, 40 ans après, des gestes simples, de la solidarité, des échanges, des rires et des drames, des rêves et de l’amour qui ont forgé leurs existences.
Avec cette expérience, ils ont participé à l’évolution des mentalités, ils ont fait bouger les lignes et provoqué en quelque sorte les grands débats sociétaux de la fin du XXe et début XXIe siècles.
Ils sont les 40 auteurs de ce livre, un livre collectif, dont Jean-Pierre Bonnel a été le moteur, le scribe et le passeur et Paul Gérard le coordinateur attentif. Le temps d’une préface, Ronald Creagh a bien voulu joindre sa réflexion à la leur.
LES LIBERTAIRES EN PAYS CATALAN
CAFÉ LITTÉRAIRE
PUBLIÉ LE 12 JUIN 2018
Jean-Pierre Bonnel et Paul Gérard, auteur des "Communautés libertaires en pays catalan"
Le 7 juin, salle du Centenaire, l’association l’Oyat nazairien, présidée par Lan Mai, a reçu les auteurs de l’ouvrage Les Communautés libertaires agricoles et artistiques en pays catalan (1970-2000), éd. Trabucaire. L’un des deux auteurs, Paul Gérard, le plus ancien libertaire des P.-O., ayant vécu 30 ans en communauté entre Maureillas et Le Perthus, a offert une synthèse de ces expériences qui ont marqué une époque et un département. Quant à Jean-Pierre Bonnel, il a relaté ces 3 ans pendant lesquels il a parcouru les P.-O. pour retrouver les acteurs de cette vie hors normes et recueillir leurs témoignages. Les Communauté libertaires rappelle que les néo-ruraux d’alors, à l’origine des citadins, n’ayant aucune expérience de la vie agricole durent passer par bien des déconvenues. Pour Paul Gérard, alors en contact avec les milieux anarchistes parisiens, tout commence avec la rencontre à la Sorbonne d’un Catalan qui l’initie au projet de vie communautaire. Un mas à la frontière espagnole, les Carboneras, est choisi afin d’aider les révolutionnaires espagnols. Nombre de mas sont alors abandonnés en cette période de désertification des campagnes. Puis vient le temps de l’accueil d’enfants qualifiés de cas sociaux, des problèmes avec la DDASS avant l’agrément qui permet de recevoir les enfants du seul département des P.-O.
Pourquoi ces pratiques ont-elles tourné court ? Pour J.-P. Bonnel, les difficultés d’intégration dans un groupe, les problèmes de couple, le besoin d’argent, la difficulté de s’adapter au monde rural expliquent l’échec de ces communautés bien qu’il en subsiste encore un certain nombre en Europe. Les aventures passionnantes de ces communautés sont à retrouver dans l’ouvrage de J.-P. Bonnel et P. Gérard (en librairie). Info sur les prochaines manifestations de l’Oyat nazairien sur le site de l’association : www.oyatnazairien.e-monsite.com Tél. : 06 95 28 25 98.
AC66
Publié dans Pyrénées-Orientales, Littoral, Perpignan Littoral, St-Nazaire
**3 MAI 2016
Jean-philippe Domecq, écrivain, critique d'art, journaliste
- Vient de paraître "Communautés libertaires dans le 66 - 1968/2016" (Trabucaire éditeur) : par Jean-Philippe Domecq, Maurice Durozier, Jacques Quéralt, Myrtille Gonzalbo
- Vient de paraître "Communautés libertaires dans le 66 - 1968/2016"
(Trabucaire éditeur) : par Jean-Philippe Domecq, Maurice Durozier, Jacques Quéralt, Myrtille Gonzalbo
***Les communautés libertaires agricoles et artistiques en pays catalan
(1970-2000)
Jean-Pierre Bonnel et Paul Gérard
ISBN: 978-2-84974-233-4 / 180 pages / 15 €
Dans le sillage de mai 68, les années 1970 sont une formidable explosion de jeunesse, de désir, de libération. Le vieux monde craque de partout. C’est le temps rêvé des ruptures, des révoltes, des expériences.
Dans ces années-là, ils avaient 20 ans, ils voulaient échapper à la routine « métro, boulot, dodo », réagir contre le mode de production capitaliste et la société de consommation, s’associer avec d’autres pour vivre autrement et porter ensemble un projet commun libérateur.
Ce fut le temps des communautés, rurales, urbaines, agricoles, artistiques et autres collectifs, d’esprit libertaire pour la plupart.
Dans ces années-là, en pays catalan, les 40 personnes qui racontent, dans ce livre, leur expérience communautaire, ont fait ce choix. Ils ont loué des mas et des terres dans des espaces en voie de désertification. Ils y ont vécu, travaillé et mis en pratique leurs idéaux. Les Carboneras, le mas Julia, Vilalte, Montauriol, St Jean de l’Albère, Malabrac, Fontcouverte, Cailla, Opoul, le mas Planères, Canaveilles, Fillols... autant de noms qui claquent comme des symboles de liberté, de sens et d’humanité.
Ils témoignent, 40 ans après, des gestes simples, de la solidarité, des échanges, des rires et des drames, des rêves et de l’amour qui ont forgé leurs existences. Avec cette expérience, ils ont participé à l’évolution des mentalités, ils ont fait bouger les lignes et provoqué en quelque sorte les grands débats sociétaux de la fin du XXe et début XXIe siècles.
Ils sont les 40 auteurs de ce livre, un livre collectif, dont Jean-Pierre Bonnel a été le moteur, le scribe et le passeur et Paul Gérard le coordinateur attentif. Le temps d’une préface, Ronald Creagh a bien voulu joindre sa réflexion à la leur.
JPB
**BESZONOFF & BONNEL, par Jacques Quéralt
Dans la production des livres qui s'étalera samedi 23 avril sur les stands de la sant Jordi 2016, quai Vauban à Perpignan, ou ailleurs dans le département, deux titres méritent d'être "convoités" pour des raisons différentes mais parce qu'elles illustrent la curiosité et le brio de deux écrivains, J.-D. Beszonoff et J.P. Bonnel, particulièrement actifs, féconds et polémistes.
C'est tout d'abord "L'année de Syracuse" de Joan-Daniel Beszonoff publié par Balzac Editeur. Il s'agit de l'auto-traduction assistée de "Matar de Gaulle" qui dans sa version originale catalane (Empuries, 2014) connut un beau succès, critique et commercial, remportant le premi Joaquim Amat-Piniella. On sait que l'un des personnages au coeur du livre est le lieutenant colonel Jean-Marie Bastien-Thiry (1927-1963) qui perpétra l'attentat du Petit-Clamart (22 août 1962) contre le Général Charles de Gaulle (1890-1970), président de la République Française (1959-1969). Le titre français "L'année de Syracuse" adoucit quelque peu l'uppercut du titre original. Il emprunte à la "bande son" qui traverses tous les écrits de l'auteur et qui est ici un explicite clin d'oeil à la chanson de Bernard Dimey-Henry Salvador. Il s'agit d'un roman sur fond historique et autobiographique, bien structuré et prenant, fait de colère et de tendresse, passant d'une rive à l'autre de la méditerranée, par la plaisante anecdote ou la fine analyse psychologique ou politique
C'est ensuite la concrétisation d'un projet de Jean-Pierre Bonnel aux Editions du Trabucaire sous le titre "Les communautés libertaires agricoles et artistiques en pays catalan (1970-2000)".
Réalisé en collaboration avec Paul Gérard et préfacé par Ronald Creagh, l'ouvrage explore une thématique à peine effleurée par l'histoire et la sociologie régionales. Il est constitué d'une série d'enquêtes témoignages qui reconstituent les enthousiasmes, les bienfaits ou les insatisfactions d'expériences plus que sexagénaires pour quelques unes d'entre elles. Mythiques et nostalgiques (peu-être), Carboneras, Planères, Opoul...
Parmi la quarantaine de contributions, celles du peintre Michel Pagnoux et du romancier critique d'art Jean-Philippe Domecq, alors insouciants de ce qu'ils allaient devenir, elles composent une mosaïque de sensibilités qui, loin s'en faut, ne sont pas toutes éteintes. Jean-Pierre Bonnel, co-auteur du livre est romancier, essayiste (notamment attaché à la mémoire de Walter Benjamin), et blogger en constante alerte.
* blog de J.Quéralt - Metbarran, du vendredi 22 AVRIL 2016.
***A retrouver dans le livre : Jean-Philippe Domecq
Jean-Philippe Domecq est romancier et essayiste. Il a été membre du comité de rédaction de la revue Esprit et rédacteur de Quai Voltaire, revue littéraire. Il a reçu le prix du Pen Club français pour Qui a peur de la littérature ? (Mille et une nuits, 2001).
**Maurice DUROZIER (entretien dans "Communautés libertaires dans le 66"
JEUDI 5 MAI 2016 A 17H FRANCE- CULTURE SUR LES DOCKS.
THÉÂTRE ITINÉRANT: la famille DUROZIER
Cette histoire de la famille Durozier s'inscrit aussi aussi dans l'histoire plus large du théâtre itinérant, elle-même insérée dans l’histoire globale du pays. Un documentaire expressément conseillé à celles et ceux qui aiment la radio, le théâtre et la famille DUROZIER.
J.Quéralt - blog Metbarran LUNDI 2 MAI 2016
- - -Livre de Myrtille Gonzalbo (auteur de la chronologie dans le livre sur "Les communautés libertaires dans le 66"- Trabucaire éditeur)
****Souvenirs de la guerre d’Espagne, par les Giménologues
Nouvelle édition enrichie et corrigée, en deux volumes, dans un coffret cartonné, agrémentée d’un CD-ROM comprenant dix heures d’émission de radio reprenant nombre d’extraits.
« Les Fils de la nuit est un livre remarquable par tant de côtés qu’on ne sait trop comment en rendre compte. Doit-on dire que nous tenons là le plus précieux des témoignages sur ce qui fut le guerre civile d’Espagne et qui aurait pu être la première révolution vraiment prolétarienne ? Ou souligner que, sans le secours décisif de quelques libertaires, ce témoignage, pour singulier qu’il soit, aurait perdu à ne pas être assorti d’un appareil de notes, proprement extraordinaire, qui le rend si éclairant ? […] Dans le cas de Giménez, son style, rudimentaire mais chaleureux, fait mieux que bien des romans écrits à l’huile de coude. Sans doute parce qu’il incarne dans sa chair chacune des phrases qu’il arrache à sa mémoire. Dans ce registre, je ne connaissais jusqu’ici que le bouleversant Ma guerre d’Espagne à moi, de Mika Etchebéhère. » Gérard Guégan, Sud-Ouest, 28 mai 2006.
Préface de François Godicheau
Deux volumes sous coffret
et
Aragon 1936-1938. Récits de protagonistes libertaires
Giménologues (les)
Le 19 juillet 1936, Saragosse tombe aux mains des troupes franquistes soulevées contre la république espagnole. La chute de la « perle anarchiste » représente une terrible catastrophe pour le camp libertaire.
En Catalogne et en Aragon, des volontaires se mobilisent pour reprendre la ville – et, pour la plupart, l’offensive ne peut se dissocier de la mise en œuvre du communisme libertaire.
C’est ce que retrace cet ouvrage, ancré dans des récits d’hommes et de femmes engagés à divers titres dans ce processus à la fois militaire et révolutionnaire, que les anarchistes se retrouveront peu à peu seuls à poursuivre.
Chercheurs autodidactes mais extrêmement lettrés et méticuleux, les Giménologues ont rencontré ces rescapés – ou leurs enfants – dans la foulée d’un premier livre traitant de la révolution espagnole, Les Fils de la Nuit, élaboré autour des souvenirs d’Antoine Gimenez et également coédité par L’Insomniaque éditeur.
Dans la continuité des Fils de la Nuit, les Giménologues tentent une nouvelle fois d’articuler les histoires particulières et l’analyse des questions collectives. Ils ont ajouté des développements de leur cru sur la nature du projet communiste libertaire, ainsi que sur la polémique, encore entretenue de nos jours, à propos d’une supposée cruauté spécifique des anarchistes espagnols.
© Myrtille Gonzalbo