Création et information culturelle en Catalogne et... ailleurs.
L'inquisitrice de l'amour (pour un roman..?)
Chaque soir, à l'heure de dormir, elle me presse de questions...
C'est comme un rituel. Que veut-elle savoir ? Faire le bilan de la journée..? Se sécuriser au-sujet de mes sentiments..? Savoir ce que je pense d'elle..? Si je l'estime ? Si je l'aime..?
Elle veut des paroles, des déclarations, des explications, des preuves... Que veut-elle donc ? Je suis au bord du sommeil et c'est à ce moment du basculement dans la nuit qu'elle me demande...
Dis, pourquoi tu restes avec moi..? Pour la compagnie ?
Je grommelle, je marmonne, j'éructe des mots inaudibles pour gagner du temps. Et pour ne pas répondre. Je n'aime pas dire l'intime, exprimer les sentiments, prononcer le mot "amour"...Je n'aime pas m'épancher.
Alors, elle récidive.
Elle se rabaisse, se mésestime, n'a pas une image positive d'elle-même. Même, elle se trouve laide. Ne peut se définir, entrer en elle. Elle se qualifie de "transparente". Elle serai une sorte de passe-muraille.
Mais non, tu es très bien, un beau visage, des lèvres sensuelles, une ample chevelure rousse, des yeux grands à voir le monde réel et l'invisible...
Non, je ne suis pas belle, je ne m'aime pas. Me déteste, même !!!
Tu exagères : tu es pleine de qualités : intelligence, ouverture d'esprit, culture, expérience : tu as vécu de par le monde, tu as vu des pays, des peulmes; tu connais des coutumes; tu as appris des tas de détails dur des gens de continents, où je ne suis jamais allé... Tu es bien supérieure à moi dans ce domaine. Moi, je n'ai qu'une culture livresque; je vis dans la théorie, le virtuel, la pensée, les remarques ou les écritures des autres, de ceux qui ont vécu à l'étranger et sont revenus plus riches et, surtout, moins mesquins... Ici, dans le local, je manque de rdcul : tu m'apportes l'ouverture, l'horizon, les invitations de la mer... Bien plus, des l'océan, de tous les océans insoupçonnées. De toutes les beautés et couleurs du monde terrestre ! Et tu te blottis là, au fond du lit, à te lamenter sur ton petit être, alors que tu es une personnalité autre, différente, originale, passé au philtre les vents de l'univers et construite avec les peaux accumulées des gens que tu as côtoyés, caressés, embrassés... Au fait, combien d'hommes as-tu connus au cours de tes voyages..?
Ce n'est pas l'objet de la discussion de ce soir ! Je ne veux pas parler de moi ou de mes expériences. Je te demande où tu en es, toi, en ce qui me concerne... Comment me vois-tu ? Me considères-tu ? Que veux-tu de moi ? Que fais-tu là, si près, dans ce lit..? Tu perds ton temps avec moi, tu ferais mieux d'aller voir ailleurs...
Il faut laisser du temps au temps..Non,banal : du temps à l'amour. A l'apprentissage, à la connaissance, à l'exploration de l'autre...
Tu ne réponds pas, tu esquives, tu fuis. Tu ferais mieux de revenir avec L. Voilà une femme qui étais sûre d'elle, autoritaire, enthousiaste. Elle savais te guider, te mener, t'emmener en voyage, au ski, à une exposition...Tu ne crois pas ?
Non, à présent, je préfère l'accalmie, une sorte de pause...Pour mieux rebondir et aller de l'avant, plus tard... Dans un an, dans un mois...
Non, parle, confie-toi, m'aimes-tu..?
Je ne veux pas plonger dans l'intime. Je préfère rester à la surface, ne pas m'analyser. Agir, avancer, foncer... Vers "l'extime"... (JPBonnel)
Rarement le repos. A une place rêver d'être ailleurs. Etre largués dans un étrange réel. Déconnecter à chaque signe. Et agir, soit lentement, soit pris de panique à peine contrôlée, la peur collée au ventre. Parfois être tentés de sombrer dans la surabondance de sens comme on prendrait une main tendue, la main de l'irrationnel, fascinés, dans une sorte de rêverie naturelle, constatant qu'une explication est impossible sauf à tout « pathologiser ».
Aller de l'avant malgré tout, ne pas savoir arrêter le processus, car comment refuser l'extraordinaire ? Reconnaissants évidemment du caractère précieux de la vie. Mais agrandir, écarquiller le regard à l'écoute des phrases d'un tel ou d'une telle, à la vue d'une phrase écrite, de telle ou telle image...
Tomber parfois dans un sourire béat sans la sensation de plénitude. Ne jamais vivre ce drôle de réel « comme tout le monde », jamais rassurés parce qu'on ne sait pas mettre soi-même des mots sur nos expériences vécues. Plus souvent le regard perdu, maintenir malgré tout son rôle au quotidien, tout en étant sincères dans nos amours. Tout vivre à l'excès, n'être jamais envahis par des sensations justes, euphorie maladive ou pensées morbides à se foutre en l'air illico presto, en quelques instants se sentir partir, souffrir de trop ressentir !!!
Mais même la souffrance n'est pas constante. Hors de tout grand destin, surtout pas celui de témoins du divin ? Souffrir de toutes ses tripes, de tout son cœur, de toute son âme, pour rire comme des hystériques la minute d'après !!! Sensibles et inadaptés au monde, le crier au grand jour !
Dormir peu, dormir mal, dormir tout le temps. S'illusionner en permanence, tout croire sacré, ou être indifférents à tout, et même parfois se croire dans une mission quand ce n'est pas notre nullité qui nous scie les pieds !
Tomber tête baissée dans tous les pièges de la vie. Un réel, mais lequel ? Où tout est trop lourd de sens, trop grave dans la responsabilité dont on se croit investis, concernés tout le temps par tout, soumis à notre aura mais sans le pouvoir de se maîtriser !
Agir en funambules, lourdement somnambules au grand jour !. Avoir cette étiquettes de « fous » collée dans le dos, comme si tout le monde le savait. Etre paranos, toujours prendre pour soi les paroles venues d'ailleurs, les mauvaises comme les bonnes !!!! Ne pas savoir faire abstraction des autres, reliés à tout, mais dans des liens forts cependant bien souvent interchangeables !!! Avoir parfois de vrais amis. Vivre des moments toujours intenses. Danser comme personne auparavant n'a pu danser, loin de tout contrôle, comme dans une « transe de sauvage ».
Crever de vivre. Car n'est-ce pas une question de vie ou de mort chaque jour ? Etres fragiles, êtres de substance mais futiles, où on ne rêve plus de vivre normalement dans la société, avec une famille, avec un travail et tout le tralala. S'altérer par dessus le marché la personnalité, à coup de médocs, de tabac et d'alcool, parfois d'une manière compulsive !
Les pensées en désordre, atteints de logorrhée, passant du coq à l'âne. Se boucher les oreilles pour ne pas entendre, pour ne pas LES entendre, et dans l'extrême encore, vouloir se claquer la tête contre les murs, se cracher dessus et chialer comme des gosses parce que ça gueule des obscénités dans le crâne, parce que la bouche déconne et qu'on est obligés de gueuler à son tour seuls dans la rue nuit et jour, pires que le plus sauvage des sauvages. Batailles au quotidien dans la lutte pour survivre, car vivre tout court ça ne veut rien dire, ce n'est tout simplement pas possible !!! De détresse parfois implorer les Cieux, sans plus vraiment y croire le lendemain dans un monde qui hurle de toutes les manières la défaite de Dieu, qui se retrouve source de honte « par ce qu'on en a fait » !!! Monde où (,,,), Monde où la lumière nous aveuglerait, nous ne sortons plus que pour une fuite en avant de nos niches ou nos terriers, de nos cavernes ou nos casernes, de nos sous-sols ou de nos immeubles !!! Suicidaires dans un monde de suicidaires, mais pour rien !!! Juste parce que la bataille à mener est celle contre soi-même, faire la peau de la bête en soi, ou se tuer tout simplement parce qu'on sent bien qu'à l'intérieur ça déconne et qu'on ne se supporte plus !. Et pour ceux qui se relèvent, pour ceux qui s'en sortent, qui remontent le boulet, parfois devoir tout réapprendre : apprendre à parler, apprendre à lire, apprendre à écrire, apprendre à marcher, pas réapprendre à aimer puisqu'il ne s'agit que de ça !!!, jusqu'au prochain clash, jusqu'à la prochaine chute !!! : tout est fuyant tout est glissant. Dans l'incohérence, dans un répit presque impossible, rire fort voire mentir pour ne rien montrer. Pressés, oppressés par la vie agressive de la société, demander grâce, repos, silence, comme on prierait de détresse. Tout craindre mais avoir une audace terrible, tout craindre mais ne pas savoir relativiser, même pas vraiment sur la feuille, et se croire le talent des grands sans continuité dans l'apprentissage !!!
En massacrant de toute façon quotidiennement le reste de mémoire ou de talent, le peu ou le trop plein de raison. Etre toujours dans l'élan, sans la justesse du dosage !. Rechercher un monde supportable dans une vie qui sera forcément courte ! Et parfois, parfois seulement : briller comme un soleil !!! Car même la joie est inconstante.
Tout est fuyant tout est glissant. (Carole G.)