Promenade dans Berlin (3)

Walter Kreipe, historien, mon guide érudit à Berlin.

Berlin, flânerie 3

On peut marcher de façon naïve, errer en inculte dans la ville et ne rien voir…

Si ce n'est s'intéresser à la mode, aux boutiques à l'air du temps, qui est financier, commercial : achetez, consommez !

On peut aussi, c'est votre entière liberté, lever la tête et tenter de comprendre, saisir l'origine d'une vieille maison, apprécier l'architecture d'un immeuble…

Berlin est à appréhender avec un guide féru d'art et d'Histoire. Un livre (un guide en papier) ne suffit pas : vous allez baissez les yeux sur le texte au lieu de les lever vers les structures de verre et de fer, vers le détail baroque et l'armature de béton… 

Ville vidée, explorée, anéantie. Il ne reste que de rares bâtiments des vieux siècles… La guerre a saccagé l'Histoire urbaine. La ville s'est reconstruite et l'urbanisme le plus insolite est né de ces terrains vagues, de ces espaces devenus vastes à cause des bombes : les Berlinois nouveaux ont inventé une cité neuve !

Il faut posséder l'art de la flânerie et ça s'apprend, ça se médite. Quand vous allez en rando en montagne, vous ne vous risquez pas à l'aveuglette mais observez la carte, les difficultés du terrain, les courbes de niveau, l'altitude du sommet, la météo, les éventuels dangers et embûches…

Pour flâner en ville, avec une fausse désinvolture, mais avec le désir d'apprendre, de percer le mystère des pierres et des enseignes, vous préparez le parcours avec des lectures. Mieux que le guide, la bonne littérature ! Lisons donc Le Paysan de Paris, d'Aragon et les Surréalistes que W. Benjamin aimaient tant. Lisez les Passages parisiens et vous retrouverez à Berlin quelques lieux identiques.

Oui, il faut tenir dans son sac à dos les promenades de Franz Hessel : il a su, le premier, créer le genre littéraire de la flânerie philosophique, analyser la rue, le bâtiment, l'agencement des quartiers…

Promenez-vous le nez en l'air pour admirer les grilles, les toits et les façades ! Ne marchons plus naïfs, idiots, paysans !

J.P.Bonnel - 16 juin 2015