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Par leblogabonnel
Sur le sentier du Fort Saint-Elme
Ecrit, trouvé, ramassé, lettre ou brouillon.
Ecrit, non pas écrit, mais retranscrit, à peine mis en ordre, je veux dire en syntaxe,
colonne vertébrale de la langue pour les uns, dure baguette sur les doigts encrés pour les autres…
Sur le sentier du château ramassés quelques mots perdus, sans collier ni nom du maître…Qui disent un texte long, pareil à un poème, car écarquillé devant un étrange monde blanc, car écartelé par les quatre vents de la page muette…
Saint-Elme, elle scandait la narratrice, parce que l'écriture dansait comme le corps d'une qui s'invente !
Saint-Elme, je t'aime, et autres mots aux tendres atours.
Toi, le seul soleil de la pensée de mes baisers,
le soleil de mes deux fleurs jaunes qui font avancer ma poitrine.
Il fera jour un beau jour. Il sera une bonne fois pour toutes, quelque chose d'unique et d'irreprésentable.
Un jour…
Quand tu auras décidé de m'aimer, de me prendre, de m'apprendre..Le jeu de la bête à deux dos, ce préhistorique geste d'amour.
Alors je, et tu, je deviendrai moi, quand tu viendras à moi, vers ma conque, ma coquille saint-elme…
Quand tu m'appelleras de mon prénom, qui bat de ses deux ailes impatientes.
Et l'on s'aimera, tels deux collégiens qui ne veulent pas rompre le lien, le cordon blanc des escargots, jusqu'au seuil du mariage, qui sera un recommencement d'amour.
Mais nous avons le temps. Tranquille est la glisse du serein escargot dont la bave vernit le soleil et les galets du Boramar…
Alors, dit l'écrit, dans la feuille tournée, versée, investie par mes yeux de loup :
"Le bahut plein le cul…le français plein le nez…"
Finie la poésie, finis ses cortèges courtois dans les ornières du sentier saint-elme.
Nicher la nudité des corps, la rondeur du désir…
Plaisir et désir, mais, auparavant, je te tends, amante, la perche avec les mots !
Je te le dis, je vois dans tes yeux un amour grand, chaud tel l'infini désert, cet amour qui est mien, je le veux nôtre !
Aimer. Se briser d'amour, les genoux sur les pierres, comme ils n'ont jamais osé, les Anciens, les inventeurs d'amour, les premiers du sexe…
Comme on n'a jamais osé se montrer. Le mot jamais osé !
S'aimer dans les nids terreux, sur les plages vierges, dans l'orbe rocheuse d'une crique, dans l'écume fraîche d'une mer, sur le bois d'une barque de ce pays d'or et de sang, dans la cabane faite de lauzes d'un vignoble en terrasses…
Mais un jour, la campagne jalouse nous a ceinturés, son ombre sur la mer dit que cet amour doit finir à jamais puisque seul le jamais sait clore le poème.
Dernier crépuscule sur le golfe du Lion…
"Quoi qu'il en soit", finit Carmen, celle qui, en écrivant, le vent inventa, "le marteau de ton nom aura gravé quelque part, dans son corps, dans son coeur, dans mon écorce de yeuse, le mot brûlant qui anéantit l'éternité même…
JPB
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