Création et information culturelle en Catalogne et... ailleurs.
Par leblogabonnel
* Il faut aller aux conférences de l'association
Culture et patrimoine
à Banyuls/mer, puis lire les synthèses réunis dans des cahiers à conserver (ci-dessous et bulletin d'adhésion):
Soumise à un rude climat de semi-altitude (vents fréquents au dessus de 100 km/h) la Massanereprésente aujourd’hui une extraordinaire sentinelle de l’accélération du changement climatique et, bien que non exploitée depuis 140 ans, elle est menacée par la diminution des précipitations, l’augmentation des températures moyennes et le trafic routier intense très proche (col du Perthus). On y élève des vaches, habituées à la montagnes, aux pentes. Plus de 50 000 arbres y sont suivis individuellement depuis 40 ans et nulle part ailleurs, y ont été menés autant d’études et d’inventaires de microorganismes, champignons, flore et faune. La libre évolution du système forestier y a permis l’accumulation d’une extraordinaire faune d’espèces saproxyliques, vivant dans le bois mort. Tout ceci lui a valu en juillet 2021 d’être classée par l’UNESCO au patrimoine mondial de l’humanité. Une gloire fantastique pour une forêt française. On l'aime, on la protège, elle constitue un extraordinaire "laboratoire à ciel ouvert" et sa conservation est essentielle.
Bibliographie
J Garrigue, J A Magdalou et G Boeuf, La réserve naturelle de la Massane, 2012, ESpèces, 3, 65-69.
Soumise à un rude climat de semi-altitude (vents fréquents au dessus de 100 km/h) la Massanereprésente aujourd’hui une extraordinaire sentinelle de l’accélération du changement climatique et, bien que non exploitée depuis 140 ans, elle est menacée par la diminution des précipitations, l’augmentation des températures moyennes et le trafic routier intense très proche (col du Perthus). On y élève des vaches, habituées à la montagnes, aux pentes. Plus de 50 000 arbres y sont suivis individuellement depuis 40 ans et nulle part ailleurs, y ont été menés autant d’études et d’inventaires de microorganismes, champignons, flore et faune. La libre évolution du système forestier y a permis l’accumulation d’une extraordinaire faune d’espèces saproxyliques, vivant dans le bois mort. Tout ceci lui a valu en juillet 2021 d’être classée par l’UNESCO au patrimoine mondial de l’humanité. Une gloire fantastique pour une forêt française. On l'aime, on la protège, elle constitue un extraordinaire "laboratoire à ciel ouvert" et sa conservation est essentielle.
Bibliographie
J Garrigue, J A Magdalou et G Boeuf, La réserve naturelle de la Massane, 2012, ESpèces, 3, 65-69.
Il est une forêt dans l’extrême sud de la France, en pays catalan, dans les Pyrénées Orientales, qui porte le nom d’une petite rivière côtière, la Massane. Elle est essentiellement composée de hêtres, qui trouvent ici leur limite sud de répartition en France.
Entre 600 et 1100 m d’altitude, elle est proche de la Mer Méditerranée, au dessus de la commune d’Argelès-sur-Mer et s’étend sur 336 ha. Elle représente aujourd’hui le site (ramené à sa surface) le plus riche en nombre d’espèces en Europe : nous y avons déterminé plus de 10 000 espèces vivantes - oiseaux, poissons, mammifères, tous les vertébrés - et on fait maintenant des inventaires de groupes plus difficiles à étudier. Elle est, chronologiquement, la 5ème réserve nationale naturelle créée en France, en 1973.
La réserve de la Massane a 50 ans
Créée en 1973, la Réserve naturelle nationale (RNN) de la Forêt de la Massane, classée au patrimoine mondial de l’UNESCO en 2021, a fêté ses 50 ans d’existence cette année. Depuis mai et jusqu’en novembre 2023 des conférences, des expositions et bien d’autres manifestations se déroulent pour en marquer toute l’importance et l’intérêt scientifique. Culture et patrimoine en Côte
Historique
Par Joseph Trav
Joseph Travé est Directeur de Recherche honoraire au CNRS. En 1954, il commence l'étude de l'écosystème forestier de la hêtraie de la Massane. Après sa thèse, en 1963, il poursuit l'étude d'autres écosystèmes naturels forestiers (Népal, Inde) ou non (Iles australes et Antarctique).
Spécialiste des Acariens Oribates, il oriente ses recherches sur la morphologie, la biologie et l'évolution de ces petits arthropodes. La protection de la nature est un sujet qui s'est imposé des le début de son activité scientifique, localement (la Massane, Paulilles, le Canigou), régionalement (Parc national des Cévennes), nationalement (Parc National des Pyrénées). Membre d'une ONG internationale, Medforum, il a participé à la protection de la Méditerranée.
Un laboratoire à ciel ouvert
Par Elodie Magnanou
Elodie Magnanou est Docteur en Biologie et Ingénieure Agronome. Tout au long de sa carrière de chercheuse aux États- Unis puis en France elle a visé à décrypter les adaptations des organismes vivants en réponse aux contraintes de leur environnement. Ingénieure de recherche au CNRS à l'Observatoire Océanologique de Banyuls depuis 2008, elle s’est entre autres intéressée à la réactivité du hêtre au changement climatique. En parallèle de ses recherches, elle est gestionnaire de la Réserve Naturelle Nationale de la forêt de la Massane.
Depuis des décennies, la forêt de la Massane et le monde de la recherche ont tissé une étroite relation de complémentarité au bénéfice de la protection de la nature.
Comme toutes les vieilles forêts, la hêtraie de la Massane est caractérisée par son ancienneté, sa maturité et sa naturalité. Ces particularités, devenues rares en Europe, rendent les vieilles forêts précieuses. Elles constituent de formidables réservoirs de biodiversité. Elles fournissent des services écosystémiques fondamentaux (stockage du carbone et de l’eau, production d’oxygène, régulation du climat, stabilisation des sols entre autres) bien mieux qu’une forêt de production. Un faisceau de preuves scientifiques s’accumule également pour démontrer leur meilleure résilience face aux contraintes naturelles ou liées au changement global d’origine anthropique. Enfin, elles constituent de formidables laboratoires naturels au cœur desquels les scientifiques peuvent étudier l’évolution en marche. En effet, elles sont soustraites à toute exploitation et à tout retrait de bois mort, c’est le cas depuis plus de 140 ans à la Massane. La dynamique de la forêt répond donc naturellement aux contraintes de son milieu : personne ne choisit quel arbre va vivre ou quel arbre va mourir, les lois de la sélection naturelle s’appliquent librement.
Créée à l’initiative de chercheurs du laboratoire Arago – Observatoire Océanologique de Banyuls, la réserve naturelle nationale de la forêt de la Massane est un haut lieu de protection de la nature et stimule un bouillonnement scientifique visant à mieux comprendre le fonctionnement et la dynamique de cet écosystème forestier.
La localisation atypique de cette hêtraie, au sud de l’aire de distribution du hêtre, à basse altitude, en plein milieu méditerranéen a d’emblée interrogé sur son histoire. Les analyses comparant la diversité génétique de populations de hêtres à l’échelle de l’Europe puis, plus finement en France et péninsule Ibérique ont permis de confirmer l’hypothèse des paléontologues : le hêtre est parvenu à se maintenir même pendant les périodes glaciaires du Quaternaire dans la haute vallée de la Massane. Avec d’autres populations, la Massane a représenté le refuge catalan, l’une des zones à partir desquelles différentes lignées génétiques du hêtre ont recolonisé vers le nord l’ensemble de l’Europe après la dernière glaciation, il y a environ 10 000 ans.
Ces arguments moléculaires, ainsi qu’en particulier la présence de charbon de hêtres dans le sol (pédoanthracologie) indiquent donc que la hêtraie est présente en continu à la Massane depuis des millénaires. Après avoir traversé des bouleversements climatiques naturels, elle se trouve aujourd’hui à la limite des conditions climatiques favorables au hêtre. Les travaux de recherche menés à la RNN visent à évaluer sa réactivité face aux changements en cours.
Grâce au progrès fulgurants des technologies de séquençage, 150 génomes complets de hêtres ont par ailleurs été obtenus. Ils permettent de déterminer quelles pourraient être les bases génétiques de certains traits physiologiques observés à la Massane comme l’aptitude à résister à la sécheresse ou la précocité du débourrement des bourgeons. Ces données sont aussi l’occasion de comparer la réactivité de la Massane, et les bases génétiques associées, à celles d’autres populations européennes pour tester l’hypothèse d’une adaptation locale.
Cette cartographie forestière permet non seulement de suivre la dynamique du hêtre, espèce clé de voûte de l’écosystème, mais également son rôle de support de biodiversité grâce à l’inventaire récurrent des dendromicrohabitats : dendrotelmes, cavité de tronc, présence de champignons, etc. A titre d’exemple, un travail collaboratif a démontré que l’amadouvier héberge à lui seul plusieurs centaines d’espèces d’arthropodes à l’échelle de l’Europe.
Le fonctionnement d’un écosystème doit aussi être appréhendé par l’étude des interactions durables entre espèces. C’est le cas des mycorhizes, ces relations symbiotiques (à bénéfice réciproque) entre les racines des arbres et les champignons du sol. Il existe également les coopérations possibles entre les bactéries et leurs hôtes, les lichens. Ces symbioses sont explorées par une approche de génétique à haut débit. Une portion du génome, servant de sorte de code-barre est séquencée afin de connaître la diversité et l’identité des espèces en interaction.
Une réserve tout de même soumise aux influences humaines
Si l’essence même d’une réserve est de préserver au maximum ce territoire des activités humaines, elle ne peut rester indemne de tout impact anthropique.
Plusieurs polluants atmosphériques ont été suivis de manière ponctuelle ou récurrente à la Massane : la hêtraie est exposée à de fortes concentrations en ozone. Ce résultat contre- intuitif s’explique par le fait que la vallée de la Massane est sous la double influence des vents marins apportant la pollution de la métropole de Barcelone et de la voie routière du col du Perthus toute proche. Les concentrations en métaux lourds recueillis dans les eaux de pluie sont suivies chaque mois. A terme, la comparaison de ces tendances avec le littoral catalan permettra de déterminer la capacité d’interception de ces polluants par la forêt. Enfin, l’abondance en microplastiques transportés sous forme d’aérosols est comparée entre une zone source, l’agglomération de Perpignan, et la Massane comme potentielle zone puits, sous l’influence des vents dominants. Les analyses sont en cours.
La forêt de la Massane est et restera en libre évolution. Cependant, malgré la protection apportée par le statut de réserve naturelle, elle est en partie soumise aux pressions extérieures exercées par les activités anthropiques. Nous sommes là pour suivre sa dynamique, tenter de comprendre son fonctionnement, et l’accompagner le plus discrètement possible dans son cheminement au cœur d’un monde qui change.
Pour toute recherche d’informations et pour aller plus loin dans l’exploration des travaux du site :
Réserve Naturelle Nationale de la Forêt de la Massane
http://www.rnnmassane.fr
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