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Le vernissage, samedi 1er septembre, de l'expo "regard nomade sur l'oeuvre de W.Benjamin et A.Machado", à Saint-Cyprien village *, attira, malgré la froide tramontane, la plus grande foule esthète de l'été !
Le CAC allait donc revivre, au coeur d'un village tourmenté depuis plusieurs années ?
Le lieu me rappela, en effet, les grandes expositions de M. de Montozon, dont un éditeur courageux devrait publier les écrits lumineux ! Le lieu, hanté en ce samedi, par le poète mort à Collioure et le philosophe, qui s'est suicidé à Port-Bou, était aussi parcouru par le souvenir de l'ancien maire, M. Bouille, fidèle aux vernissages, accompagné de l'ancien conservateur Sébastien Planas. M.Bouile aimait tant l'art qu'il détourna des oeuvres municipales pour son propre plaisir; inculpé, lâché par ses amis politiques (UMP), il se suicida dans la prison de Perpignan.
A présent, le nouveau maire, Thierry Del Poso, libéré de ses ennuis municipaux (garde à vue, vente d'un camping sans appel d'offres; harcelé par trois conseillers municipaux UMP, l'ancien militant au "Nouveau Centre" adhéra à l'UMP et se débarrassa des fâcheux du même bord), relance l'art contemporain. Cet enfant de la Retirada, petit-fils de Républicains communistes, a invité un artiste ami (études similaires à la Sorbonne), qui parle de l'exil espagnol durant la guerre civile, parallèlement à celui de W. Benjamin : le poète et le philosophe sont morts de chaque côté de la frontière (**).
C'est un an et demi (et non 6 mois, comme l'affirma J.Capella en son discours peu structuré et non éclairant) qui sépare leurs fins comparables (février 1939, Machado meurt d'épuisement à la pension Quintana de Collioure-septembre 1940, suicide de W.B.). Il est regrettable aussi que J.Capella, insérant dans ses toiles des extraits de l'ultime lettre de W.B. prononce Benjamin à la française, alors que Walter était juif "Benyamin"; en outre, qualifié à deux reprises d'Israélien, W.B. a toujours refusé le poste proposé par son ami Scholen à Jérusalem; juif et marxiste, WB n'était en rien sioniste...
En ce lieu tragique, évoquant des moments historiques sinistres, le spectateur n'éprouve pas de sentiment profond face aux grands formats de J.Capella; il s'agit d'un vagabondage sans conséquence, de peinture décorative, sans grande imagination... On peut, certes, être amusé -alors que tout sourire est déplacé en ce Centre d'art- par ces grands disques colorés au centre desquels, le promeneur peut apercevoir la mer, cet horizon indépassable et angoissé qui était celui de Machado, venant jusqu'au Boramar, et de Benjamin, passant l'épreuve des "passages" jusqu'au cimetière marin dominant Port-Bou et l'infini...
* Centre d'Art Contemporain
Place de la République
66750 SAINT-CYPRIEN
Contact
33 (0)4 68 21 32 07
Contact presse : Stéphanie Misme : +336 74324951
** Voir mon livre "Machado et Benjamin, deux destins à la frontière", puis la réédition en deux volumes, aux éditions Cap Béar (2010 et 2011): Machado, de Séville à Collioure - W.Benjamin, la mort à Port-Bou (15 euros)