Création et information culturelle en Catalogne et... ailleurs.
H. Arendt et son éternelle cigarette, omniprésente dans le film de M.Von Trotta.
Le film ne s'intéresse -avec quelques retours en arrière sur Hannah étudiante et amoureuse de Heidegger- qu'à l'époque où, résidant à New York, la philosophe va assister au procès Eichmann de 1961, pour le NewYorker. Ses articles seront ensuite repris en volume sous le titre "Eichmann à Jérusalem", paru en 1963, et en français en 1966, avec comme sous-titre "Rapport sur la banalité du mal".
Elle adresse des objections à ce procès : criminel jugé en vertu d'une loi rétroactive par un tribunal de vainqueurs; l'accusation inculpait Eichmannn de crimes "contre le peuple juif" et non "contre l'humanité": "seul un tribunal international convenait pour juger ce genre de crime", écrit-elle dans l'épilogue de son gros rapport (édition folio histoire, page 443)
Arendt accuse Israël et Ben Gourion de faire de ce procès un spectacle et de la propagande...
Ce qui choquera surtout c'est qu'une juive accuse les responsables d'associations juives en Allemagne d'avoir été complices des nazis et d'avoir participé à la déportation de leurs compatriotes.
Ainsi, on s'étonne du peu de révolte et de résistance de la part des juifs sous Hitler, à l'exception de quelques mouvements venant de jeunes et, bien sûr, de la résistance du ghetto de Varsovie. La situation, exceptionnelle, l'organisation totalitaire du régime nazi en étaient-ils les causes ? On peut s'interroger encore sur l'acceptation de la "servitude volontaire" et relire La Boétie.
La même passivité se retrouve dans la hiérarchie nazie : Arendt nous montre des fonctionnaires ou soldats soumis et prêts à tous les crimes pour faire leur devoir, appliquant par là "l'impératif catégorique" de Kant ! La nation allemande est-elle rangée par ce mal interne, ce recours au chef, au surhomme (Hitler, Niestche, Wagner...), que l'exposition actuelle à Paris "De l'Allemagne" semble suggérer, provoquant ainsi des polémiques..?
Car ce qui a scandalisé le lecteur juif, c'est surtout le portrait que dresse H.A. de Eichmann : ce n'est pas un criminel, un responsable conscient de ses actes, mais un homme simple, "normal", banal, sans charisme, qui nous est montré. Il n'a pas de mobile, il ne s'intéresse qu'à son avancement : "il ne s'est jamais rendu compte de ce qu'il faisait" (page 494) !
Ce n'est qu'un rouage dans la vaste machinerie fasciste ! Là se niche le mal et sa banalité : 'est "la pure absence de pensée"; il n'est pas stupide, mais reste à la surface des choses et ne parle que par clichés et lieux communs, répète les impératifs du devoir et de sa mission de fonctionnaire s'occupant des transports des juifs vers les camps; il ne voit pas les conséquences de ses décisions, il ne voit pas l'horreur de la "solution finale" !
On a pu accuser la SNCF (ses chefs et ses employés) d'avoir été complices de Hitler, en permettant les transports de juifs à travers la France de Pétain, en direction de l'Allemagne... Elle peut répondre qu'elle ne faisait qu'obéir... Il y eut cependan, l'extase et la possessiont la Ré sistance et même, chez les officiers nazis, des tentatives d'assassinat d'Hitler...
Arendt a été favorable au verdict: la peine de mort pour Eichmann, mais en lisant son livre, on pense qu'elle aurait pu être son meilleur avocat : la défense du "criminel" avançait l'argument du "bouc émissaire"; Arendt propose celui du "pauvre type", obéissant, chaînon inconscient d'une hiérarchie implacable...
Elle comprendrait à présent ces millions de "braves gens" qui votent, sans être racistes ou antisémites, pour le Front national, et qui feront un jour le succès de l'extrême droite (de la même façon que Hitler fut élu de façon démocratique) si la crise, la récession et l'obscénité du spectacle politique (affaires de sexe et d'argent de la part de nos dirigeants et chefs de partis) se poursuit dans le théâtre tragi-comique actuel...
* Lire aussi la biographie de H.A. par Julia Kristeva "Le génie féminin. 1." (folio essais)
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Conférence sur le chamanisme : la transe, l'extase et la possession.
"Au fond de tous nos états mystiques, écrit Marcel Mauss, il y a des techniques du corps, des moyens biologiques d'entrer en contact avec Dieu".
Du chamanisme et des états modifiés de la conscience, conférence-débat, proposée par l'Association Frontières et André Roger, psychanalyste, le vendredi 17 mai, 18h30, à Villelongue de la Salanque, salle Jean Pierre Frances, près de l'église.
Entrée libre