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Création et information culturelle en Catalogne et... ailleurs.

Le "fast book" - La littérature rapide - Stéphanie JAEGER

images  Stéphanie Jaeger *


  Le livre est devenu un objet de consommation comme un autre. L'édition donne naissance à un multitude d'ouvrages, sans cesse : livres souvent  vite faits, vite publiés, mal diffusés -les librairies sont trop sollicités- et vite oubliés...

 

Rares sont à présent les livres mûris, qu'on porte en soi pendant des années, qu'on travaille et polit chaque jour...Ce n'est plus la longueur et la profondeur de La Recherche du temps perdu (l'écrivain, et le lecteur non plus, n'a pas de temps à perdre...), mais l'écriture rapide du temps présent, contemporaine de ses lecteurs : les grands succès sont les livres d'auteurs conformistes, Lévy, Coelho, Poivre d'Arvor..., de nègres, parfois...

 

Et, miracle,  parfois un chef-d'oeuvre, désormais classique, comme L'Etranger de Camus  : ce livre de poche, "jetable", est devenu un "fast book", à la vitesse de l'époque et des "fast food" !

 

Le lecteur goûte un peu, en parcourant la version numérisée, ou passionnément, en achetant un volume dans un vide-grenier : dépenses très limitées, puis il jette; il va vagabonder sur le net, il écoute une critique, il lit une phrase admirative dans un journal, il regarde les auteurs choisis par une émission de radio ou de télé...

 

Oui, on subit la mode, les influences, les humeurs du temps, les groupes de pression, on fragmente, on tente sa chance dans la masse des écrits, mais c'est, au bout du compte, le divorce avec la valeur "littérature"; à l'image d'une société qui se fissure : séparations, égoïsmes, rencontres multipliées et superficielles, partenaires sans fin...

 

Le livre est fabriqué souvent à partir d'un blog composé au jour le jour, non structuré, formé d'une suite de chroniques intimes; la cohérence peut se faire grâce au retour des personnages -souvent des bobos se regardant le nombril- et des situations : la drague, les enfants, le régime alimentaire, les relations avec l'autre, les rapports dans le couple, avec le malaise d'un mâle déboussolé et d'une femme en apparence libérée... C'est de la sociologie, sauf si l'auteur trouve un style, un rythme, de l'ironie...alors, on respecte ! Je pense aux chroniques hilarantes et aux aventures du quotidien de Stéphanie Jaeger...

 

L'aura du livre est perdu, Benjamin nous l'a dit depuis longtemps, en 1936 ..! 

 

Certains éditeurs tentent de poursuivre l'aventure du livre - beau, bien confectionné et que l'on a envie de conserver près de soi - en soignant l'impression et la mise en page d'ouvrages artisanaux, tirés à quelques dizaines d'exemplaires et destinés à un lectorat minoritaire et éclairé...

 

Quand un livre humaniste ("Indignez-vous", de S.Hessel) ou difficile (de philo, de sciences humaines : Badiou, Finkielkraut) a un impact et redonne espoir, c'est le miracle; quand la fiction ("Harry Potter") donne aux jeunes le goût de la lecture ou quand le roman ("Les Versets sataniques" de S.Rushdie) brise la monotonie des nouveautés, on croit en la force de la littérature ! 

 

On se reprend à rêver, à espérer, à croire que le monde de l'écrit n'obéit pas aux lois du marché et que le livre n'est pas un objet comme un autre !!!

 

* Lire : "Les tribulations de Stephy J.", 2012, éditions LTSJ - Tome 2 "Journal d'une célibattante", 2013, LTSJ - Avec Nelly Gurb : "Conjectures improbables et hypothèses flottantes", 2013, LTSJ éditeur.

 

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