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Le lorrain Etienne Bodin devient catalan par adoption
Son père, Étienne Bodin (1652-1730), affublé du sobriquet « Boismortier » était un ancien militaire originaire, par son grand-père Michel, des confins du Berry et de la Touraine (Selles-sur-Nahon) près de Châteauroux. Après un passage à Laval, Étienne entre en garnison au régiment du Soissonais cantonné à Thionville et obtient une dispense de ses obligations militaires afin d'épouser, le 7 avril 1687, Lucie Gravet (1665-1738), une jeune fille du cru. Il met à profit la tradition familiale en devenant marchand confiseur, à l'ombre de la Cathédrale Saint-Étienne de Metz.
Dès le 24 mars 1688, un premier enfant voit le jour : une fille, Marie. Appelée à devenir maîtresse tailleuse dès 1712, elle épousera, le 8 avril 1720 sur la paroisse Sainte Croix de Metz1, Jean Bouchotte, 35 ans, marchand boutonnier. Leur fils, Jean-Didier, caissier de l'Extraordinaire des Guerres puis Receveur-payeur des gages des officiers du Parlement, aura lui-même plusieurs enfants dont Jean-Baptiste Noël Bouchotte, éminent ministre de la guerre sous la Convention, entre 1793 et 1794.
Le 18 novembre 1691, à Thionville toujours, une petite Catherine est baptisée. Enfin, le 29 septembre 1700 est enregistré le décès de Marie-Thérèse, à Metz cette fois, avant qu'on ait eu le temps de la faire passer sur les fonds. Pour achever ce portrait de famille, une lettre datée du 11 janvier 1753 et adressée par Boismortier au Surintendant des Beaux-arts, atteste de l'existence d'un peintre, Pierre Etienne, qui fut effectivement reçu dans sa corporation messine le 28 mars 1719.
Boismortier est alors très probablement destiné à reprendre la boutique de son père mais ses talents déjà perceptibles le font embrasser une toute autre voie...
La formation
Jusqu'à récemment, le plus grand flou régnait sur cette première période. Soucieux de prêter à l'adolescent un professeur prestigieux, on avait supposé que Joseph Bodin avait pu suivre l'enseignement d'Henry Desmarest, alors en exil lorrain depuis 1707. Il n'en est rien. En 1702, il chante en effet avec son frère à l'église messine de Saint-Gorgon, certaines parties du motet Parce mihi Domine de la composition de Joseph Valette de Montigny. Ce dernier, originaire de Béziers, était venu en Lorraine dans la suite du vicomte d'Andrezel, conseiller du Grand Dauphin, et nommé depuis 1701, subdélégué à l’Intendance d’Alsace. Les deux personnages auront une importance capitale dans la suite de la vie de Boismortier ; le jeune homme composant sans doute ses premières pièces en Lorraine.
Perpignan : Pour fuir l'avenir de confiseur qui l'attendait, Boismortier accepte, en 1713, de s'expatrier en Catalogne. Il y arrive à Perpignan comme receveur de la Régie Royale des Tabacs pour les troupes en Roussillon. L'achat d'une telle charge suppose une aide financière plutôt qu'une donation paternelle...
En place dans le quartier Saint-Jean de Perpignan, Boismortier épouse le 20 novembre 1720, à la cathédrale, Marie Valette, nièce de son professeur languedocien et fille d'orfèvres grassement enrichis. Il s'établit alors dans la demeure familiale, au n°7 de la rue de l'Argenterie Vella *; maison dont il ne tarde pas à hériter au décès de son beau-père, le 18 mars 1722. Tombe également dans son escarcelle, « une vigne située au terroir de Vernet, de deux ayminattes et trois cartonattes »...
* Rue de l'Argenterie, qui mène à la place Rigau.
(demain : le musicien de Fossa à Perpignan)