Création et information culturelle en Catalogne et... ailleurs.
(C) François Pous.
Quelques jours à peine après la disparition de Jojo Pous, Collioure invite les Pous du Boulou, une famille qui a donné des oeuvres fortes, nées de la matière brute, d'où cet art -parfois artisanat- qualifié de naïf et brut. (voir le musée de Lausanne)
Ce texte, avec une photo de François Pous, par J.Pierre Bonnel, a été publié en 2004 dans le recueil "Catalogne en peinture" (éditions Midiques- 15 euros, port compris, chez l'auteur : 06 31 69 09 32)
Chez François POUS
Autrefois, Le Boulou sentait l'odeur du liège. A présent, le village ne sent plus rein.
Lieu insipide, troué de passages incessants, traversé par les folies du temps libre.
Le mas familial des Pous exhale encore des senteurs de liège, trente ans après la fin de l'activité liée à l'exploitation des chênes. Malgré trente ans d'attente et trente ans de vinaigre...
Ailleurs, le moût de raisin a pénétré les charpentes de la salle où le vin va patienter, mer qui baigne le verre et le bouchon, des années avant d'être libérée, durant quelques courtes heures, ouverte à l'air libre.
François Pous, c'est le travail du marbre; la forme, la courbe, la sensualité inventées de la brutalité de la matière. La femme ronde, aux fesses continentales, aux seins altruistes, qu'on ne peut pas toucher, s'offre dans le blanc de Carrare ou le rose du Vallespir. Puis, c'est l'éloge de la fente : la femme-coquilmage, la Vénus née de la veine de la pierre, se résume à un perthuis chanté dans tous les marbres du monde. Les plus beaux corps issus du monolithe sont ceux qui sont humanisées par de nombreux circuits sanguins.
François, vous ne devriez pas être si modeste; ne faites pas semblant d'ignorer que la gloire n'advient aujourd'hui qu'à ceux qui s'adonnent à la fiction du moi, au cinéma des sentiments, au marché de l'art, au scandale médiatique ou à la gesticulation qui assoit la présence de l'artiste.
Avec POUS devant nos yeux séduits, nous lisons OPUS ! Ce sacré François est une Oeuvre à lui tout seul !
Son art se nourrit des années de son paradis perdu : de l'âge de cinq ans à celui de onze. Ses oeuvres ne sont que ses "jouets". Son travail se résume à la continuation de l'enfance par d'autres moyens. Naïfs, enfantins, donc, ces objets ludiques : tableaux, galets fouaillés, fers maîtrisés, lièges sculptés... cela ne veut pas dire qu'on ne doit pas prendre ce style de jouet au sérieux !
François Pous est heureux; il aime dire : "dans ma vie, je n'ai jamais connu l'ennui ! Dans ma mort, on verra bien..!"
La création est sa vie. Elle a rempli sa vie. Toute.
Son temps est inscrit dans ses oeuvres. Sont-elles oeuvres temporelles ou perpétuelles ? La belle affaire ! L'imbécile question !
Je préfère conserver, dans mon secret cahier de coloriage, les émerveillements de cet increvable enfant.
-Jean-Pierre Bonnel (Le Boulou, août 2003)-
* samedi 16 mars, à 11 heures, au musée d'art moderne de Collioure, "maison Peské", vernissage de l'exposition "art brut" des artistes Jean Pous, François Pous et Henriette Viallat (du 16 mars au 12 mai).
** Pour l'été et l'automne, l'exposition Edouard Pignon, "Femmes en Méditerranée : les Catalanes à Collioure, étés 1945-1946" (1er juin au 13 octobre).