Blog de débat pour ceux qui sont fatigués du discours des partis politiques, leurs représentants disant tous la même chose (exemple, hier soir à Cpolitique : un gouvernement de gauche ! la gauche est en tête de la partition ! abrogez la réforme des retraites ! On a même entendu la rédactrice en chef de l’Humanité dire que la dette, ce n’est rien ! La gauche fatique, les électeurs s’abstiendront de plus en plus, les citoyens quittent le débat politique vain et superficiel … JPB
L’ère du vide
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« Un taxi vide est entrée dans la cour du Parlement, et monsieur Clément Attlee en est descendu » (Winston Churchill)
Aujourd’hui, je vais me lancer dans un style littéraire inédit : je vais commenter des non-évènements. Je parle bien entendu de la nomination d’un non-premier ministre, en la non-personne de Gabriel Attal le 9 janvier dernier. Un non-évènement suivi d’un autre, la conférence de presse du non-président de la République du 16 janvier.
Il paraît que depuis le 9 janvier, nous avons un nouveau premier ministre, c’est-à-dire, un homme qui depuis l’Hotel Matignon « détermine et conduit la politique de la nation », selon les termes consacrés par la Constitution. Est-il possible, sans consommer des produits illégaux, imaginer Gabriel Attal dans ce rôle ? Impossible, non, difficile, certainement, surtout après avoir constaté qu’il hérite ses principaux ministres du gouvernement d’Elisabeth Borne, et que ceux-ci déclarent rester en poste par la volonté exclusive de l’occupant de l’Elysée sans même en avoir discuté avec le nouveau premier ministre.
Et ce n’est pas une question d’âge : à 34 ans, on peut avoir beaucoup vécu. Pensez à ces jeunes qui à vingt ans ont connu l’enfer des tranchées. Ou bien ceux qui ont rejoint la Résistance ou la France Libre en laissant tout derrière eux, avec au bout la perspective des batailles, de la torture, de la déportation, de la mort. Quatorze ans plus tard, ils avaient vécu pour beaucoup la fraternité des combats, la peur de l’arrestation, la prison, la déportation, les combats de la Libération et ceux de la reconstruction. Ils avaient vécu des tragédies, et eu l’opportunité d’en tirer les leçons. Plus près de moi, je pense à mon grand-père, qui à trente-quatre ans avait vécu un pogrom, une émigration, le métier de contrebandier, la vie à l’usine, une grève sanglante, une crise économique – celle de 1929 – et formé une famille avec la responsabilité de mettre le pain sur la table tous les jours.
Rien de tel pour Gabriel Attal, exemple presque caricatural du cursus honorum de l’apparatchik socialiste du XXIème siècle, cet homme dont l’histoire tient dans deux arrondissements parisiens, comme l’écrit si joliment « Le Temps ». Né dans un foyer aisé, éduqué dans la meilleure école privée parisienne que l’argent puisse acheter, passé par cette institution bâtie sur le bavardage qu’est Sciences Po Paris, formé dans la politique étudiante et rentré dans le monde des cabinets ministériels sans passer par la case « boulot ». Sa vie active commence… avec un stage comme attaché parlementaire de Marisol Touraine alors députée, qu’il suivra comme conseiller lorsqu’elle deviendra ministre. Dès lors, tout son parcours se fait dans le petit monde de la politique façon PS. En bon apparatchik socialiste, il se présentera à la première opportunité pour avoir un mandat, ce sera en 2014 pour devenir conseiller municipal à Vanves. Il quittera le parti socialiste lorsque Macron annoncera sa candidature… mais pas avant de s’être assuré de l’investiture du parti présidentiel aux élections législatives. Elu député, il connaîtra une ascension fulgurante. A quoi le doit-il ? A sa connaissance des dossiers ? A sa vision stratégique ? Que nenni : « grâce à son sens politique et à son aisance à l’oral. Et surtout, en profitant du vide. Alors que beaucoup de ses collègues du groupe LREM, composé en majorité de novices, n’osaient pas prendre la parole en public au début de la législature, lui a très vite crevé l’écran en défendant l’action d’Emmanuel Macron avec un aplomb et une facilité déconcertants pour son jeune âge » (Alexandre Lemarié, « Le Monde », 16 octobre 2018).
Mais derrière cette facilité de parole, cet aplomb qui feraient de lui, n’en doutons pas, un excellent directeur de la communication, quelle profondeur, quel vécu, quelle tragédie personnelle, quelle expérience formatrice qui le rendraient réceptif aux joies, aux peines, aux malheurs et aux besoins de la nation qu’il est chargé en théorie de conduire ? Il n’y a chez lui rien, à part l’ambition dévorante. Pas de projet, pas d’engagement, rien. Sa promotion à Matignon réalise les mots prophétiques du cardinal de Retz : « l’homme public ne monte jamais si haut que lorsqu’il ne sait pas où il va ».
Tout ça n’a guère d’importance, parce que personne ne demandera à Gabriel Attal de conduire et déterminer la politique de la nation (1). Non. Le président de la République n’a pas nommé un premier ministre, dont il n’a que faire. Avant lui, le président avait nommé une préfète dont la mission était de faire ce qu’on lui demandait de faire. La mission d’Attal – et il semblerait qu’il l’ait acceptée – est de diriger une campagne électorale, celle des élections européennes. Et non de diriger – et encore moins de former – un gouvernement. Comment le pourrait-il d’ailleurs, alors que ses principaux ministres tiennent leur légitimité et prennent leurs ordres à l’Elysée, et s’en vantent publiquement ? Même le privilège d’annoncer les orientations du nouveau gouvernement lui est dénié : ce sera le président de la République qui, dans sa conférence de presse à peine quelques jours après l’avoir nommé, donnera le « la ». On économise ainsi le travail : Attal n’aura plus qu’à en faire le résumé devant la représentation nationale quand il prononcera finalement – trois semaines après sa nomination, un record – son discours de politique générale.
Ce qui m’amène à la conférence de presse du président. En regardant cet étrange spectacle, je n’ai pu m’empêcher de me demander ce que Mongénéral en aurait pensé. Le décorum était certes digne de la république gaullienne était là : le bureau solitaire, les couleurs nationales, la devise de la République dans laquelle, par une étrange maladresse, la « fraternité » figurait en caractères deux fois plus petits que les deux autres éléments du triptyque républicain. Seul manquait l’élément essentiel, le président de la République.
A sa place, le fauteuil était occupé par un candidat, débitant un discours de campagne. La rémunération du travail ? Tout le monde sait qu’elle se dégrade depuis dix ans, mais le candidat nous promet qu’en 2024 son gouvernement va prendre des mesures « pour mieux gagner sa vie au travail » et s’assurer que « la dynamique salariale soit au rendez-vous des efforts ». Les « déserts médicaux » ? Ce n’est pas un secret que la situation s’aggrave d’année en année depuis vingt ans, mais promis juré, en 2024 on fera ce qu’il faut. La sécurité ? Les trafics gangrènent les quartiers et les points de deal fleurissent au vu et au su de tout le monde depuis des lustres, mais en 2024 « dix opérations « place nette » seront menées chaque semaine contre le trafic de drogue, dans toutes les catégories de ville ». A l’entendre nous expliquer que l’école va mal, que l’hôpital va mal, que l’industrie va mal, que l’ordre public va mal, mais que désormais on va voir ce qu’on va voir, on a l’impression qu’il a oublié qu’il préside aux destinées de la France depuis six longues années, et qu’il participe à la conduite des affaires de la nation au plus haut niveau depuis une décennie.
Comme le politique n’a plus de projet global, pas de boussole qui donne un sens à son action, sa communication ne peut qu’être réduite aux sacro-saintes « annonces », sorte de liste au père noël que présidents et ministres égrènent à chaque apparition publique, et qui est soigneusement composée pour satisfaire chaque segment de l’opinion sans mécontenter les autres. Liste dont les électeurs que nous sommes écoutons la lecture un peu comme les vaches regardent passer le train, parce que l’expérience a largement montré qu’il ne sort jamais de ses rails, et qu’au bout du compte il suit la même voie, qui dans le cas d’espèce est une voie de garage. Mal réfléchies, ne s’inscrivant dans aucune cohérence, ces annonces restent dans la catégorie du vœu pieux, quand ce n’est pas du recyclage d’annonces précédentes, ou de dépenses déjà prévues et qui sont resservies régulièrement. Cela fait penser à ce pays latino-américain raconté par Gabriel Garcia Marquez où chaque autorité nouvellement élue réclame le privilège d’inaugurer un hôpital. Mais comme d’hôpital, il n’y en a qu’un, le méchant bâtiment est régulièrement « inauguré »… (2)
Le macronisme n’a jamais été un projet. Il était et reste la conjuration des ambitions personnelles des seconds couteaux venus de la droite et de la gauche « de gouvernement » qui, dans un contexte de rejet des partis traditionnels, et soutenus par une bourgeoisie et des classes intermédiaires pressées de faire sauter ce qui reste de l’œuvre du Conseil national de la résistance, ont vu une opportunité de prendre le pouvoir. Avec un discours faussement « moderne », en se prétendant « progressistes », en usant et abusant de ce « en même temps » censé contenter tout le monde, ils ont pu faire illusion pendant quelques années. Mais après six ans au pouvoir, l’heure du bilan n’est pas loin : il montre qu’ils n’ont rien à dire au pays, rien à lui proposer, aucune conviction profonde à faire partager, aucun combat collectif à engager. Macron veut jouer le personnage de De Gaulle, mais pour cela il lui manque ce qui faisait l’essentiel du discours gaullien, une « certaine idée de la France ».
Ce manque de vision explique d’ailleurs pourquoi le macronisme est réduit, depuis ses débuts, à jouer les pompiers. L’action n’est pas guidée par un projet, mais par l’urgence de faire face aux crises et aux accidents au fur et à mesure qu’ils se présentent, en général en jetant quelques milliards dans le trou. Quand les gilets jaunes ont cassé l’Arc de Triomphe, ils ont eu 15 milliards entre subventions et réductions fiscales. Quand ça a commencé à s’agiter sur l’inflation, on a jeté soixante milliards en subventions à l’énergie. Et maintenant, alors que les agriculteurs bloquent les routes, qu’est-ce qu’on leur offre ? Un projet pour une agriculture de demain, qui permettra aux agriculteurs de vivre de leur travail ? Non, bien sur que non. On ne leur propose qu’une liste de mesurettes et quelques centaines de milliers d’euros de prolongation de la détaxe sur le gasoil.
Le seul souci de la macronie, c’est de garder le pouvoir, sa seule problématique, c’est de durer. Macron est prêt à signer la loi sur l’immigration la plus droitière de notre histoire, parce que les voix sont à droite. Si elles étaient à gauche, il serait en train de serrer la main des immigrés clandestins à l’Elysée. Attal, qui en son temps conchiait la ligne anti-communautariste de Manuel Valls qu’il estimait trop « jacobine », marque des points en se faisant passer pour l’ennemi numéro un de l’abaya. Tous deux étaient antinucléaires sous François Hollande, quand il s’agissait de fermer Fessenheim, ils jurent pour le nucléaire aujourd’hui – sans qu’on voie d’ailleurs grande chose bouger.
Vous me direz qu’il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis. Je vous répondrais qu’il ne s’agit pas ici d’avis, mais de discours. Parce qu’en dehors de quelques vagues opinions, je ne suis pas persuadé que Macron pas plus que Attal n’aient de convictions faites sur ces questions, qu’ils aient un véritable « avis » qui serait susceptible de changer. Ou du moins un avis qui résisterait un tant soit peu aux appétits électoraux. L’exemple de la loi immigration, où le président demande à sa majorité de voter un texte qui jette par-dessus bord tout son discours sur la question pour racoler la droite, et n’hésite ensuite, devant la grogne de ses troupes, à demander au Conseil constitutionnel de le refaire, souligne jusqu’à la caricature l’absence de convictions de la tête de l’exécutif. Un célèbre homme politique avait choisi le slogan « mes idées ? mais ce sont les vôtres ! ». Le couple Macron-Attal lui donne largement raison (3).
On dit que si dans les années 1920 l’académie des Beaux-Arts de Vienne avait été moins stricte dans sa procédure d’admission, bien des malheurs auraient été évités au monde. Il est probable que si la Comédie française avait appelé le jeune Emmanuel ou le jeune Gabriel à rejoindre sa troupe, la France se serait bien mieux portée. Beaucoup de commentateurs négligent en effet ce point commun aux trajectoires de notre président et de son premier ministre. Tous deux ont été et sont des passionnés de théâtre, et celui-ci a joué un rôle important dans leur parcours. C’est vrai pour Macron, qui s’est découvert lui-même et a découvert le seul amour de sa vie dans des cours de théâtre. Cet amour du théâtre ne l’a jamais quitté : c’est une constante de son parcours politique. Depuis 2017, il joue chaque jour une pièce qui s’appelle « moi, président » devant un public de moins en moins nombreux et de moins en moins intéressé. Et en le regardant, on ne peut que rappeler le constat de la pièce d’Eduardo de Filippo qu’il s’était proposé, à 15 ans et avec l’aide de sa professeure de théâtre, de réécrire : « la parfaite vérité, c’est et ce sera toujours la parfaite fiction ».
Gabriel Attal partage avec le président ce détail biographique. Pour lui aussi, le théâtre a joué un rôle fondamental dans sa formation même si, contrairement au président, il n’a pas poussé la chose jusqu’à coucher avec son professeur – quoi que puissent dire les ragots malveillants. On comprend alors pourquoi Macron a choisi Attal. Tous deux agissent comme si la politique était d’abord un spectacle, comme si la mission de l’homme politique était de faire partager une fiction. Peu importe que la couronne soit en laiton, que l’épée soit en bois, pourvu que les gens y croient. Et peu importe que le royaume soit perdu, que le personnage soit mort, puisque le cadavre se relèvera pour rentrer chez lui une fois le rideau tombé. Cela explique peut-être pourquoi notre président donne plus d’importance à la parole qu’à la réalité, pourquoi il est insensible aux désastres et aux malheurs que ses décisions provoquent, pourquoi il semble presque surpris lorsqu’il constate que, contrairement à ce qui arrive lorsqu’on est sur les planches, les paroles ne s’envolent pas lorsque le rideau tombe.
Descartes
(1) C’est d’ailleurs une constante du macronisme que de réduire le rôle du premier ministre. Avec Castex puis Borne, le choix s’était porté sur des hauts fonctionnaires ayant une mentalité préfectorale, c’est-à-dire, aptes à conduire n’importe quelle mission confiée par l’autorité sans états d’âme quelles que fussent leurs convictions personnelles. On pouvait alors parler de « vide » politique, mais au moins était-ce un « vide » techniquement compétent. Avec Attal, on se trouve devant un « vide » qui ne sait faire autre chose que communiquer… sur le vide.
(2) Comme tous les communicants vous le diront, une bonne campagne s’organise autour d’un leitmotiv. Mitterrand 1981 c’était « la force tranquille », Ségolène Royal 2007 c’était « l’ordre juste ». Macron 2024, ce sera le « réarmement ». Pourquoi pas, après tout. Seulement, parler de « réarmement » implique de caractériser une menace. Or, c’est là le grand absent du discours présidentiel. On est invité à se « réarmer », mais on ne sait pas très bien contre qui, contre quoi. Or, la nature de la menace dicte la forme du réarmement. On ne choisit pas les mêmes armes pour combattre l’islamisme, la finance, le communautarisme ou le déclin économique.
(3) J’entends déjà votre objection, cher lecteur. Prenons la réforme des retraites. N’est-ce pas là un exemple des convictions de notre président ? N’est-ce pas un exemple où il a fait voter par conviction un texte rejeté par une large majorité des électeurs ? La réponse est simple : le texte qui a été voté n’est pas celui que Macron avait défendu. Rappelez-vous : à l’origine, le président voulait une réforme qui instituait un système « à points », ce qui sur le fond n’était pas une mauvaise idée. A la fin, il s’est retrouvé à faire voter une simple mesure d’âge. Un peu l’illustration du principe énoncé par Groucho Marx : « voici mes convictions, mais si elles ne vous plaisent pas, j’en ai d’autres ». Et s’il est resté droit dans ses bottes, ce n’est pas par conviction mais pour deux raisons tactiques : la crainte que reculer sur une réforme emblématique réduise ses marges de manœuvre pour l’avenir, à l’image de ce qui était arrivé à Juppé en 1995 ; et la conviction que le vote mettrait en difficulté le groupe LR…
Littérature : Jean-Pierre Bonnel, Images de femmes, par Clarisse Réquéna - Bibliographie - Sant-Jordi à Vernet les Bains
Roman :
Jean-Pierre Bonnel, Images de femmes
Le dernier texte publié de Jean-Pierre Bonnel, qualifié de « Romance » en sous-titre d’Images de femmes, mène le lecteur d’une rive à l’autre, de la femme à l’image et inversement, comme dans un miroir qui déclinerait les images à l’infini, jusqu’au bord du vide de la page blanche.
Qui sont ces femmes, que sont ces images ? celles de l’imagination d’un personnage, Julien, en quête d’un absolu amoureux, voire d’une rose mystique ? La démarche ne peut éluder des antécédents comme celui de Nerval ‒ la quête de l’une dans le multiple où se révèle une unité jamais conquise, seulement approchée, entrevue, subodorée, espérée. Mais définie, c’est une autre question. Ces femmes sont images dit un chapitre, les images sont silence dit un autre. Tout est déjà dit : la femme est silence, mystère, indicible pour le narrateur en quête de sens à travers l’union de la femme et de l’art.
Le Parti pris des choses de Francis Ponge donne à entendre, par exemple dans Le verre, Le cageot, etc., que l’on ne peut jamais rien appréhender sinon par comparaison… et par une solide connaissance de la langue, de l’étymologie, même si l’essence reste inatteignable.
Quoi qu’il en soit, le titre de l’ouvrage, Images de femmes, pointe la pluralité, et des images et des femmes. Il n’y a pas de volonté de classification, d’enfermement dans une image. Comme Aphrodite, la femme ondoie à travers ses apparitions, toujours se dérobe, elle n’est jamais saisie. Et pourtant, le narrateur sait ce qu’il cherche. Quelque chose que l’on appelle l’amour, le sentiment amoureux, une union qui ferait se rencontrer l’éros et l’art, où l’éros inspirerait l’art et où l’art tenterait de rendre compte d’une fusion amoureuse idéale.
L’auteur a choisi pour rendre compte de cette quête un narrateur qui donne à sourire dans sa marche maladroite, voire picaresque, et toujours couronnée d’échec, car, évidemment, jamais il ne trouve son idéal. Ou plutôt jamais il ne s’en saisit. Parce que cet idéal est rêvé mais jamais défini ? Chaque rencontre n’aboutit, bien sûr, qu’à un éclat d’idéal, jamais appréhendé ou embrassé. Cette femme plurielle qui émerge au cours des diverses expériences pourrait-elle être rapprochée d’une Béatrice ? Et La Femme existe-t-elle ou n’est-elle qu’une image fugace toujours réélaborée, reconstruite ? Comme pour les icônes orthodoxes, ne doit-elle pas toujours être recommencée parce qu’elle ne serait qu’un support de la méditation qui doit la faire oublier, la surpasser ? La romance commence d’ailleurs par l’évocation d’images pieuses chrétiennes et par l’image idéale de la femme : la mère, la première femme pour l’éternité, et la plus belle aussi.
Clarisse Réquéna
Actualité de la chercheuse (docteur ès-lettres) et conférencière
Mérimée sous le signe de Vénus : Thème et variations
Éditeur : Eurédit - Prix de vente au public (TTC) : 85.00€ - 592 pages ; 24 x 16 cm ; broché (Parution 29/01/2024 - en librairie - dans les bibliothèques universitaires, dans les bonnes médiathèques...)
Jean-Pierre Bonnel
Né à Perpignan mais racines ariégeoises. Après des études de Lettres (maîtrise sur René Char, Capes...) est nommé professeur sur divers postes (Pas-de-Calais, Tunisie, Lorraine, Alpes, P.O.). A publié de nombreux livres : romans, balades (en Catalogne), voyages, peinture (Matisse, CatalognArts), poésie (sur Machado, la Méditerranée), la politique (municipales à Perpignan, articles du blogabonnel)., la philosophie.
L’auteur a créé en 2015, à Banyuls, l'association. "Walter Benjamin sans frontières", dont il est toujours président et le Prix européen WB, du nom du philosophe juif allemand exilé en France et mort à Port-Bou en 1940.
Publications :
* Poèmes, Poésie Présente, éditions Rougerie, Limoges, 1974. Recueil collectif : G.Audisio, Jean Cassou, Andrée Chedid, Gérard Macé, Bernard Noël, Paul Pugnaud, Frédéric-Jacques Temple, Pierre Toreilles…
* L’univers imaginaire de René Char, dans Les Matinaux (Université P.Valéry de Montpellier, 1974)
* Le Regard en arrière, poèmes, éditions des Alpes vagabondes, Gap, 1991.
* Présentation du poète et académicien Nicéphore Vrettakos – dans KpokeeΣ, mensuel de Sparte, Grèce, 1992 et Guide Gallimard des Hautes-Alpes, page 88, Paris, 1997.
* Dina Vierny, une grande dame au pays de Maillol, avec André Roger et D. Vierny, éditions Frontières, Villelongue-de-la-Salanque, 2000.
* Lettre à ma ville (anthologie des textes lus aux estivales de Perpignan, juillet 2000) – Edition l’Agence, Rivesaltes, juillet 2001.
* Moi, Matisse à Collioure, Balzac éditeur, Baixas, 2003. Cette « biografiction », finaliste du prix Méditerranée Roussillon, a été adaptée, en 2005, par le comédien et metteur en scène Fabrice Eberhart, avec musique et direction de Daniel Tosi : spectacles en 2009 à Collioure (au Musée d’art moderne) et à Perpignan (au Conservatoire de Musique). Puis, en juillet 2010, au Château Royal de Collioure. Enfin, en ouverture du festival Pianissimo d’Elne, juillet 2011. En outre, quatre chapitres ont été publiés par la revue roumaine Axioma, n°45, déc. 2003, traduction de Letitia Ilea.
* La Catalogne en Peinture, recueil d’études sur la peinture en Catalogne et ailleurs, éditions Midiques, Saint-Maur, 2004.
* Walter Benjamin et Antonio Machado, deux destins à la frontière, éditions Les Presses littéraires, 2005.
* CatalognARTS, études sur la peinture et la littérature en Catalogne et ailleurs, Les Presses Littéraires, Perpignan, 2006.
* Méditerriennes, poèmes sur la mer et le désert - suivis de textes blogueurs (blogabonnel2005/2007), Autres Plumes/TDO, Pollestres, 2008.
* Reflets de Vie, anthologie de textes sur le Sida -écrits lors d’ateliers d’écriture avec des malades, à l’hôpital Saint-Jean de Perpignan. Éditions Cap Béar, Perpignan, 2007.
* 30 Itinéraires culturels en Catalogne - Nouvelles Presses du Languedoc, Sète, mars 2009.
* L’Infini de l’enfance - éditions Cap Béar, Perpignan, septembre 2009.
* Walter Benjamin, la mort à Port-Bou,éditions Cap Béar, Perpignan, décembre 2009. Nouvelle édition en 2017 (Ed. Color Gang, Palau del Vidre).
* Rafales sur Cap Béar, polar politique, éditions Cap Béar, avril 2010.
* Chemins d’Antonio Machado, éditions Cap Béar, décembre 2010, Collioure.
* Je te haine, roman, Cap Béar, 2011. Seconde version, 2015.
* La Dame de Consolation, polar mystique, Cap Béar, 2012.
* Peintres en Catalogne, du local à l’universel, Grinta, 2013.
* Les saisons de Collioure - avec photos, Grinta, 2014.
* Mathilda, roman de Collioure & Le voyage des mots, les mots du voyage (Grinta, 2014)
* Les 365 jours de Jean-Marc Pujol, campagne municipale de 2014 - Propositions culturelles et urbaines dépourvues d'urbanité pour Perpignan. (Éditions Les mots en scène, mars 2015)
* Romans pour des temps catastrophiques : Fin du temps, Les USA, c'est où, ça ?, Mexique au bois dormant, Roman d'un idiot, La bouteille au désert, journal d'un coopérant en Tunisie. (Grinta, mars 2016).
* Les communautés libertaires agricoles et artistiques dans les Pyrénées-Orientales, Editions Trabucaire, Catalogne, avril 2016.
* Le mythe méditerranéen de la Lidia de Cadaquès, avec Dali, Lorca, E. D'Ors - Color Gang, Palau del Vidre, 2017.
* Perpignan, le destin d'une ville, chronique municipale 2 - 2015/2019 - Les Mots en scène, 2019.
* Perpignan, une ville en sursis, Chronique municipale 3, 2019/2020 (le blogabonnel), Les Mots en scène, mars 2020)
Préface de Letiția ILEA, poétesse, traductrice, Cluj.
Portrait de l’artiste à l’âge cassant
Le livre récent de Jean-Pierre Bonnel, Images de femmes(Éd. Limes, 2023), que l’auteur nomme « romance des années 2024 », est, à première vue, un roman érotique. Le personnage principal, Julien Verjoul, est un écrivain, amoureux d’images et de femmes. Jean-Pierre Bonnel décrit les conquêtes de Julien, mais aussi ses échecs amoureux. Une place à part est accordée aux expositions, aux livres et aux paysages que Julien revisite, tout cela sur le fond de la guerre en Ukraine. Les itinéraires amoureux ou culturels du personnage portent l’empreinte de l’ironie et de l’auto-ironie.
Pourtant, au-delà de ce premier niveau, Images de femmes est un livre de la solitude. Ni l’amour physique, ni les livres, ni les expos ne peuvent plus chasser l’arrière-goût de la solitude de l’écrivain « à l’âge cassant ». Le dernier texte du recueil, La plus que nuit, représente en ce sens la quintessence du livre. Rien ne peut plus sauver Julien, pas même la beauté : « Qui me sauvera ? La beauté ? Elle en a fait déjà assez, à tenter de sauver le monde ! (…) Pas moi, j’en suis persuadé, à présent, après un quasi-siècle d’expositions traversées, de tableaux vus, d’installations parcourues, d’artistes rencontrés, de textes écrits dans le plaisir de celui qui découvre une création personnelle… ».
L’amour ne peut plus combler le personnage, arrivé à l’âge cassant. Julien est voué à la solitude, cette solitude fondamentale de l’être humain devant la maladie et la mort : « En effet, l’amour est loin, dans le souvenir, loin des yeux, du corps et des frémissements profonds ! (…) mais moi, qui prend pitié de ma souffrance ? Qui soupçonne le mal en moi et les déchéances du corps ? Comprend-on la douleur des autres ? Comment représenter le désespoir du prochain, qui nous frôle dans la rue ? ». Sauf à de rares moments, la communication entre les humains est elle aussi impossible. Le livre se termine sur une interrogation sur le sens de l’écriture. Celle-ci manque de sens elle aussi : « Non, non… la nuit, le plus profond et opaque du noir. Une hyper nuit, comme dirait le philosophe. L’outre-noir, comme l’a peint l’artiste. Pas l’image de femme, mais celle du rien. Point. À la ligne ? Non : le blanc de la feuille… ».
« Romance douce-amère d’une vie banale et pourtant irremplaçable », comme l’est celle de chacun d’entre nous, Images de femmes se lit alertement et avec intérêt d’un bout à l’autre, car Jean-Pierre Bonnel possède la science du romancier véritable. Il fait alterner à grande vitesse les passages sur des livres et des expositions avec les passages érotiques, de sorte que le lecteur est pris dans un tourbillon qui est celui de la vie de chaque jour de l’écrivain Julien Verjoul. La valeur individuelle de l’existence de cet être pourtant exceptionnel est dépassée, puisque Jean-Pierre Bonnel énonce dans ce roman des vérités à valeur humaine : l’impossibilité de trouver un bonheur durable dans l’amour, la communication entre humains qui est le plus souvent occultée, la solitude fondamentale de l’homme face aux maux de ce monde et à la mort, l’écriture et les arts voués à l’échec dans le monde contemporain menacé par la guerre.
Le lecteur pourra se retrouver dans de nombreux passages de cette « romance des années 202… », écrite avec vivacité et avec une conscience douloureuse de notre marche inexorable vers la destruction et la mort.
Il est fait pour choquer, réfléchir, créer son propre style : la marque Duras. Il est conscient, travaillé : fautes de syntaxe, phrases démantibulées, sa marque de fabrique.
Bien sûr, moins osé, abrupt, obscène que celui de Céline, ce style bourgeois-bohême. Le Ferdinand, il use et abuse d’une ponctuation omniprésente, lyrique, en coups de gueule : les points d’exclamations frappent le lecteur au cœur : il faut s’indigner, nous indique l’auteur. Et le rythme de la phrase nominale impose une image : l’absence de verbe implique une peinture, la touche sur un paysage, pas l’action, pas le performatif, ni passé ni futur, nous sommes dans l’écoulement temporel de l’éternel présent…
Céline a recours à l’argot, mais pas à l’incorrection : le langage des banlieues par le médecin des pauvres, des rues populaires de Paris et territoires alentours…
Le roman de Céline n’a pas une forme incorrecte, c’est le fond qui l’est : l’idéologie répugnante de la haine, de la honte, du racisme, de la délation…
Quant à la Marguerite, si vous lisez Ecrire (Gallimard, 1993), la première phrase vous désarçonne, c’est un incipit redondant, avec des mots répétés, c’est fatigant, ça tourne en rond :
« C’est dans une maison qu’on est seul. Et pas au-dehors d’elle mais au-dedans d’elle. »
Et puis, ces facilités, ce recours au « il y a », qui chez Apollinaire est poésie, ici vous crispe : l’écrivaine note tout ce que son regard voit sans pensée développée, ni vraie narration : « Dans le parc il y a des oiseaux, des chats. » Et c’est navrant de néant, de vacuité, de désintérêt…
Enfin des phrases courtes à l’apparence de pensée profonde vous mènent à une interrogation aporétique « La solitude, c’est ça aussi. Une sorte d’écriture. Et lire c’est écrire. »
Duras est d’ailleurs consciente qu’elle écrit un peu n’importe quoi, au fil d’une plume qui ne réfléchit guère : « J’ai fait des livres incompréhensibles et ils ont été lus. », à la page 36 (édition folio). Et un peu plus loin, elle est satisfaite de son livre La vie tranquille et sa phrase ultime (étonnante, incorrecte, amis c’est « de la littérature » !) : « Personne n’avait vu l’homme se noyer que moi. »
Ou cet « anglicisme » : « Le long de la maison il y encore cent ans, il y avait un chemin pour les bestiaux venir boire dans l’étang. » (les fameux il y a et ces deux infinitifs ! page 46)
Quant à la vie privée, abordée à plusieurs reprises, elle parle de ses nombreux amants, puis constate :
« Je crois que personne ne s’est retourné sur moi dans la rue. Je suis la banalité. Le triomphe de la banalité. Comme cette vieille dame du livre : Le camion. »
Le plus insolite, c’est le texte sur « la mort de la mouche » : là, je vous laisse découvrir ce morceau de bravoure sur le rien en quatre pagines… Ce serait un plagiat : elle l’a volé à qui.. ?
16 x 24 cm
592 p.
Ill. coul. et n/b
ISBN : 978-2-84830-258-4
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Clarisse Réquéna,
Mérimée sous le signe de Vénus. Thème & variations
Paris, Eurédit, 2024
Date de publication : 08 Février 2024
- Prix de vente au public (TTC) : 85.00€ (offre de lancement = voir plus haut)
- 592 pages ; 24 x 16 cm ; broché (Parution 29/01/2024 )
Comme son titre l’indique, le présent recueil consacre une large place à La Vénusd'Ille, nouvelle que Mérimée considérait, à juste titre, comme son chef-d’œuvre.
Si Vénus s’avère le thème majeur de cet ouvrage, c’est que la signature ou l’empreinte de celle-ci semble partout présente dans l’œuvre à travers les métamorphoses mériméennes qu’incarnent ses héroïnes, comme Clara Gazul, Colomba ou Carmen.
À partir de 1834, Mérimée devient inspecteur des Monuments historiques. C’est alors que l’œuvre littéraire de notre auteur puise son inspiration dans l’archéologie. La quête se double d’une enquête. Et si La Vénus d’Ille, pour notre érudit inspecteur, renvoyait comme en miroir à la découverte de la Vénus de Milo ?
D’autres aspects de la production mériméenne sont abordés dans ce livre.
Qu’il s’agisse de la figure de la Bohémienne, de la corrida ou de l’Art – marqué du sceau de la beauté grecque – Vénus apparaît encore et toujours en filigrane. L’Espagne des bohémiens et de la corrida, de l’errance et du combat, la terre promise de l’authenticité et de l’énergie, surgit alors du calame de Mérimée que seul un « Espagnol à outrance » comme l’érudit écrivain Serafín Estébanez Calderón pouvait vraiment apprécier.
C’est que la péninsule ibérique, ou la Corse, offrent aux Romantiques l’image d’un monde archaïque où Mérimée, toujours en quête des mystères de la nature humaine, peut s’adonner à une sorte d’archéologie, anthropologique celle-là.
Un ensemble de varia complète l’ouvrage : intertextualité et démarquage avec Pouchkine, Mme de Staël, Holmes, Labiche, Dumas, Djâmi, Fulgence Fresnel, échos mériméens dans les pages de Maurice Sand et de Joseph-Sébastien Pons, des précisions sur le gaspacho, fort goûté par Mérimée, et enfin une évocation de son entourage familial.
Clarisse Réquéna, docteur ès lettres, est une spécialiste reconnue de Mérimée auquel elle a consacré sa thèse (Unité et dualité dans l’œuvre de Mérimée. Mythe et récit, Paris, Honoré Champion, 2000), dont le présent ouvrage approfondit certains thèmes. Depuis lors, elle poursuit des recherches, notamment dans les Pyrénées-Orientales, sur La Vénus d’Ille. Elle en diffuse le résultat dans des revues universitaires, françaises et étrangères, et au cours de conférences.
Éditeur : Eurédit - Prix de vente au public (TTC) : 85.00€ - 592 pages ; 24 x 16 cm ; broché (Parution 29/01/2024 - en librairie - dans les bibliothèques universitaires, dans les bonnes médiathèques...)
Comme son titre l’indique, le présent recueil consacre une large place à « La Vénus d'Ille », nouvelle que Mérimée considérait, à juste titre, comme son chef-d’œuvre. Si Vénus s’avère le thème majeur de cet ouvrage, c’est que la signature ou l’empreinte de celle-ci semble partout présente dans l’œuvre à travers les métamorphoses mériméennes qu’incarnent ses héroïnes, comme Clara Gazul, Colomba ou Carmen. À partir de 1834, Mérimée devient inspecteur des Monuments historiques. C’est alors que l’œuvre littéraire de notre auteur puise son inspiration dans l’archéologie. La quête se double d’une enquête. Et si « La Vénus d’Ille », pour notre érudit inspecteur, renvoyait comme en miroir à la découverte de la Vénus de Milo ? D’autres aspects de la production mériméenne sont abordés dans ce livre.
Qu’il s’agisse de la figure de la Bohémienne, de la corrida ou de l’Art – marqué du sceau de la beauté grecque – Vénus apparaît encore et toujours en filigrane. L’Espagne des bohémiens et de la corrida, de l’errance et du combat, la terre promise de l’authenticité et de l’énergie, surgit alors du calame de Mérimée que seul un « Espagnol à outrance » comme l’érudit écrivain Serafín Estébanez Calderón pouvait vraiment apprécier.
C’est que la péninsule ibérique, ou la Corse, offrent aux Romantiques l’image d’un monde archaïque où Mérimée, toujours en quête des mystères de la nature humaine, peut s’adonner à une sorte d’archéologie, anthropologique celle-là. Un ensemble de varia complète l’ouvrage : intertextualité et démarquage avec Pouchkine, Mme de Staël, Holmes, Labiche, Dumas, Djâmi, Fulgence Fresnel, échos mériméens dans les pages de Maurice Sand et de Joseph-Sébastien Pons, des précisions sur le gaspacho, fort goûté par Mérimée, et enfin une évocation de son entourage familial.
**Extrait d'un étude de Clarisse Réquéna :
LES BOHÉMIENS DE PROSPER MÉRIMÉE
« Hier, on est venu m’inviter à une tertulia, à l’occasion de l’accouchement d’une gitana. […] Nous n’échangions nos idées qu’au moyen de quelques mots de bohémien qui plaisaient grandement à l’honorable compagnie. Es de nostres, disait-on. »
P. Mérimée à Mme de Montijo, 15 nov. 1846.
Dans plusieurs de ses œuvres, et pas seulement dans Carmen où l’héroïne est une Gitane d’Andalousie, Mérimée évoque les Bohémiens – jusqu’à son testament dans lequel il lègue à Valentine Delessert un portrait de Bohémien par Maréchal. Les Bohémiens, ce sont ces groupes nomades dont l’origine n’est pas formellement connue, diaspora visible dans toute l’Europe mais aussi en Afrique du Nord et en Asie, dont les traits physiques présentent des constantes (yeux et cheveux noirs, peau sombre, yeux obliques), dont la langue n’est parlée que par eux et au sujet de laquelle se posent bien des questions.
Leur relative liberté à l’égard des religions qu’ils adoptent, au moins pour l’aspect extérieur, au gré de leurs installations, leur liberté à l’égard du confort matériel et du travail, leur amour de la musique, constituent encore des traits qui les distinguent du reste de l’humanité. « La Bohémienne est autre », synthétise Pascale Auraix-Jonchère dans l’avant-propos de La Bohémienne, figure poétiquede l’errance.
Comme pour Béranger que Mérimée admire, c’est sans doute cette liberté toujours recherchée et pratiquée qui a fasciné l’auteur de Carmen. Mais chez le philologue Mérimée, la question de la langue, à une époque où la notion d’indo-européen voit le jour, où la question d’origine commune aux langues indiennes et européennes trouve des réponses, a sans doute été un élément fondamental qui a nourri un intérêt jamais démenti.
Précisons d’emblée que Mérimée – que Milena Fucíková classe à part parmi les Français ayant pris de l’intérêt pour les Bohémiens parce qu’il entreprit « de véritables recherches sur les Tsiganes et rentr[a] en contact direct avec eux » – désigne « ces nomades dispersés dans toute l’Europe » tantôt sous le nom de Bohémiens tantôt sous le nom de Gitans, par exemple dans Carmen. Au chapitre IV, ajouté à la deuxième édition de 1847, l’auteur précise que ces nomades sont « connus sous les noms de Bohémiens,Gitanos, Gypsies, Zigeuner, etc. »
Dans ce même chapitre, il parle « des Bohémiens allemands » (Pléiade, p. 989) ; des « Bohémiens d’Espagne » et de « horde de Bohémiens établis dans les Vosges » (p. 990) ; d’« une Bohémienne des Vosges » (p. 992) ; d’« un Bohémien de la Forêt-Noire » (p. 993) ; de « Calé » ou « les noirs », de « Gitanas d’Espagne », de « Romané tchavé » pour les Allemands (p. 989) ; de « Gitana » et de « Romé » ou « les époux » (p. 990) ; il appelle « Rommani » la langue bohémienne (p. 994). « Ajoutez encore le mot romanichel qui dans l’argot parisien désigne les Bohémiens. C’est la corruption de rommané tchavé, gars Bohémien » (p. 994).
Bref, tout le chapitre est une synthèse des connaissances dont le XIXe siècle dispose sur ceux que nous nommerons pour notre part « Bohémiens », en tant que terme générique tel que l’emploie Mérimée, comme nom que le français emploie selon le traducteur de l’Histoire des Bohémiens de Grellmann, ou selon D. M. J. Henry, tout en ayant bien conscience qu’en Espagne ils sont connus comme Gitanos, ou Égyptiens (comme aussi en France) ; dans l’Est de l’Europe comme Tsiganes ; au Royaume-Uni comme Gypsies, etc., et que les associations internationales les regroupant préfèrent aujourd’hui parler de Rom qui est le nom d’un groupe majoritaire.
Peu importe finalement, puisque, comme le note Mérimée, les langues de ces nomades, malgré l’altération liée au phénomène de diaspora, gardent les traces d’une origine commune qui serait le sanskrit. « Aujourd’hui, précise-t-il, les bohémiens ont presque autant de dialectes différents qu’il existe de hordes de leur race séparées les unes des autres »...
Mérimée en ROUSSILLON : docteur es-Lettres, spécialiste de Mérimée (et de Stendhal), auteur d'une thèse sur La Vénus d'Ille (édition Champion), Clarisse Réquéna sera présente demain mardi à la médiathèque de saint-Hippolyte :
Saint-Hippolyte, Médiathèque de l’Etang
Mardi 14 novembre 2023, de 18 h à 20 h
Prosper Mérimée dans les Pyrénées-Orientales : voyage et littérature
Les relations qu’entretiennent le voyage et la littérature nourrissent bien des études et des réflexions, et depuis bien longtemps.
Lors de cette conférence à la Médiathèque de l’Etang de Saint-Hippolyte, nous appliquerons notre réflexion à la visite de Prosper Mérimée (1803-1870) dans les Pyrénées-Orientales en 1834. L’inspecteur général des Monuments historiques de la France, fraîchement nommé, est parti de Paris fin juillet ; après plusieurs stations dans différentes régions, il arrive à Perpignan en novembre afin de poursuivre ses investigations, de visiter plusieurs monuments du département, de rencontrer les érudits locaux, en l’occurrence Jaubert de Passa, puis de rédiger son rapport adressé à son ministre de tutelle, le ministre de l’Intérieur alors en charge des Monuments historiques.
Mais Mérimée ne s’arrêtera pas à un rapport d’inspection ; il est aussi un écrivain déjà réputé. Les Pyrénées-Orientales vont lui inspirer un récit de fiction, La Vénus d’Ille, qui puise une partie de son matériau dans la réalité de la tournée.
C’est à une lecture croisée de la réalité du voyage et de la fiction que le public est invité lors de cette conférence.
CONFERENCE HISTORIQUE ET LITTERAIRE PAR CLARISSE REQUENA : PROSPER MERIMEE ET LE ROUSSILLON
18h - 20h00 > Clarisse Requena, docteur ès-lettres proposera au public une conférence historique et littéraire sur Prosper Mérimée, illustre auteur et Inspecteur général des Monuments historiques, dont elle est spécialiste.
Public adulte.
Gratuit.
F. Bueb - P. Coureux, avec Clarisse Requena, vice-présidente de la SASL.
*Décès de Francis BUEB :
Les membres du bureau de l'association Paris-Sarajevo-Europe, François Crémieux, Jean-Michel Frodon, Jean-Michel Laclavetine...font part du décès de F. Bueb, fondateur et président du centre A. Malraux de Sarajevo.
Association longtemps présidée par Jorge Semprun et aidée par le Centre A.Malraux.
*Pierre Coureux joint son témoignage : après le décès hier de Francis Bueb, un ami des AIAM que nous avions soutenu à Sarajevo.
Celui qui disait : « Je fais partie d’une génération orpheline d’André Malraux » celui qui a décidé de rejoindre Sarajevo, dès 1994, s’appelait Francis Bueb. C’est en 1996 que nous avons reçu de Florence Malraux l’invitation à apporter notre concours à un audacieux et vaillant libraire qui s’était investi d’une mission inattendue. Emue par l’engagement de Francis Bueb en faveur de la culture, Florence Malraux nous avait fortement encouragés à prendre contact très rapidement avec l’ancien responsable de la communication de la FNAC à Paris qui avait tout quitté à Paris pour lutter à sa manière contre la haine. Créer avec acharnement à Sarajevo, en pleine guerre, une librairie relevait d’un véritable pari. Nous avons aussitôt proposé nos services à ce passionné qui a su allumer une flamme qui a brillé un quart de siècle sans s’éteindre. C’est un homme généreux et une grande figure que nous ne sommes pas prêts d'oublier. Merci Francis.
Ancien éditeur, Francis Bueb a créé le Centre André Malraux et lancé les Rencontres européennes du livre qui accueillent des centaines d’artistes et d’écrivains chaque année. Il a rendu ses lettres de noblesse à la capitale de la Bosnie qui devint avec lui un lieu incontournable pour le monde littéraire et artistique.
Au Centre Pompidou, le 27 novembre 2005, un hommage lui a été rendu. Le professeur Henri Godard et moi-même nous nous étions rendus à cette manifestation.
Nous ne pouvons que nous inspirer de l’action de celui qui nous a quittés le 23 octobre à Paris à l’âge de 77 ans. Remercions-le pour tout ce qu’il a permis dans des conditions très difficiles où le prix d’un être humain ne valait plus grand-chose. Avec une énergie exceptionnelle, avec sa passion débordante pour la culture des autres et son amour précieux de l’humanité, il a réussi à nous montrer le chemin de la dignité. Merci à lui et en ces circonstances nous adressons nos très sincères condoléances à ses proches et d'abord à son fils pour qui nous avons rédigé rapidement ce court hommage. Qu'il sache que son père a réussi à faire de Sarajevo la capitale culturelle de l’Europe.
Pierre Coureux, Fondateur des AIAM - Amitiés Internationales André Malraux
Littérature
"Une façon d'aimer" de Dominique Barbéris remporte le
a le plaisir de vous annoncer une bonne nouvelle...
« Il n’était pas très grand ; des cheveux bruns, peignés en arrière et crantés, le front haut, une chemisette avec des pattes sur l’épaule. Il sourit en fumant. Puis tendit la main à Madeleine : Vous dansez ?
Elle s’excusa : Non, je danse très peu, je ne danse pas bien.
Mais il insista et il la tira vers la piste. »
Quand Madeleine, beauté discrète et mélancolique des années cinquante, quitte sa Bretagne natale poursuivre son mari au Cameroun, elle se trouve plongée dans unmonde étranger, violent et magnifique.
À Douala, lors d’un bal à la Délégation, elle s’éprendd’Yves Prigent, mi-administrateur, mi-aventurier.Mais la décolonisation est en marche et annonce la fin de partie…
La presse en parle...
«Une façon d’aimerraconte avec une évidence de chaque page un amour et un destin de femme.Le roman, magnifique, de ce qui aurait pu être et de ce qui a été. »
Le Monde des Livres
« Dominique Barbéris ressuscite l’ambiance coloniale de la fin des années 50, lourde, sensuelle et menaçante. Un de ses plus beaux romans. »Télérama
« Dominique Barbéris écrit comme un peintre, excellant dans les scènes de genre qui dégagent une impression grave et presque triste de beauté. Un roman déchirant. »
Exposition du 28 octobre au 22 décembre 2023
Du mardi au vendredi de 14h à 18h
Samedi de 12h à 18h
Acentmètreducentredumonde est heureux de présenter “DESSINE-MOI UN MURAL”, dans le cadre de la Saison du dessin, initié par PAREIDOLIE.
Cette exposition collective a pour ambition de réunir des artistes issus et présents sur l’Arc Méditerranéen, dans une volonté de créer une unité d’un Sud, allant de Nice à Perpignan en passant notamment par Marseille et Montpellier.
La volonté des commissaires est avant tout de rassembler ces artistes autour d’une pratique commune : le dessin – à travers le dispositif particulier du dessin mural, qu’ils soient sous forme de projections de films sur les murs (dessin virtuel), qu’ils se traduisent par des mises en espace, ou encore par des fresques réalisées in situ.
Commissaires: Martine ROBIN, Nicolas DAUBANES
Dominique CASTELL
Dominique Castell poursuit depuis plusieurs années une recherche artistique centrée sur le dessin et ses relations étroites avec les sentiments et la géographie. Souvent elle travaille avec le soufre de l’allumette comme pigment, avec la mine de plomb et le stylo-bille qui sillonnent l’espace de la feuille et se mets parfois en mouvement dans des vidéographies où le dessin s’anime, le temps d’une micro narration.
Nicolas DAUBANES
Les sources conceptuelles du travail plastique de Nicolas Daubanes se situent dans l’histoire des formes de résistance et de résilience. A travers le dessin et la sculpture, ses médiums de prédilection, l’artiste développe depuis plusieurs années une recherche spécifique sur la question de l’enfermement et ses conséquences tant physiques que psychologiques.
Sylvain FRAYSSE
Diplômé de l’Ecole des Beaux-Arts de Toulouse, Sylvain Fraysse porte un intérêt pour l’histoire des images, notamment le rapport entre ses codes de représentation et de diffusion. Il crée une forme de romantisme subversif désuet en ancrant son travail dans la culture rock t alternative des années 1990 qui trouve écho dans la littérature et le cinéma.
Arham LEE
Ahram Lee approche l’installation comme un geste vital. Comme celui d’un rêve vivant prenant ses repères dans son environnement, s’y adaptant et y apportant des influences ; cet écosystème évolue, dans l’interaction et deviens un ensemble d’organisations des actions des entités sensibles les unes aux autres.
Océanne MOUSSE
Dans son travail, l’immensité, silencieuse et fragile, est mise en tension par l’idée toujours présente d’une réalité éphémère. Chaque trait dessiné à la plume l’achemine vers la construction de son paysage, un travail de temps sur le temps. Ses matériaux sont tout autant l’encre de chine que l’espace vierge du papier, l’un étant révélateur de l’autre, créant une tension entre ce qui est dessiné et ce qui ne l’est pas.
Quentin SPOHN
La pratique de Quentin Spohn est basée avant tout sur le dessin. Les différents thèmes sur lesquels il travaille l’amènent à revisiter un certain nombre de genres picturaux traditionnels comme le portrait, la scène de genre et le paysage en s’inspirant d’une certaine culture picturale et de la culture populaire.
Association Walter Benjamin : Kafka par WB, Banyuls/Mer, conférence sur La Métamorphose, par Myriam Mas -
Salle Novelty, à 18 heures, entrée libre et gratuite.
Renseignements : 06 31 69 09 32
jean-pierre.bonnel@orange.fr
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Edition de tous les textes de WB sur Kafka
Essais sur KAFKA, par Walter BENJAMIN
Ce livre, dont il n'existe pas d'équivalent en Allemagne, présente, pour la première fois traduits et rassemblés, l'intégralité des textes que Walter Benjamin a consacrés à Kafka : tout ce que Benjamin a rendu public de son vivant, ainsi que tout un ensemble d'écrits restés confidentiels, de lettres, de manuscrits et d'autres documents, pour la plupart inédits en français. De 1925 jusqu'à la fin de sa vie, Benjamin a travaillé de façon soutenue et multiplié les projets autour de l'oeuvre de Kafka, qu'il tenait pour un point stratégique d'éclaircissement de son époque. Ce livre permet de prendre la mesure de la place décisive qu'occupe le travail sur Kafka dans le dernier atelier ou laboratoire de Benjamin, travail dont il écrivait : il est «destiné à devenir le carrefour où les chemins de ma pensée vont se croiser». «On pourrait faire de Kafka le personnage d'une légende : il aurait passé sa vie à chercher à savoir à quoi il ressemble sans avoir jamais su qu'il existe des miroirs.»
Essais, lettres et notes pour reconstruire le Kafka inédit de Walter Benjamin.
En 1911, Franz Kafka décide d’entreprendre un long voyage jusqu’à Paris pour se rendre au Louvre pour, comme la plupart des voyageurs, voir la Joconde...
C’est à Franz Kafka, qu’il ne rencontra jamais, que Walter Benjamin dédie un remarquable essai, identique à celui, récemment reconstruit par Giorgio Agamben, sur Charles Baudelaire. Parce que la guerre imposa la fermeture des revues et des maisons d’éditions et a interdit aux juifs de publier des livres, ce texte n’est jamais paru dans son intégralité. Mais, sur les conseils de Robert Kahn, l’éditeur cherche ici à le reconstruire, entre notes, correspondances et pages publiées.
L’essai est tout entier consacré à la notion d’échec, pivot autobiographique entre Franz Kafka et Walter Benjamin...Kafka n’a qu’une certitude, celle de son échec. Conçu, construit, perfectionné, fondé, consolidé. De cette colossale muraille de Chine de la faillite, avance Walter Benjamin, la pierre angulaire est précisément l’amitié avec Max Brod qui, pour le philosophe allemand, reste la cible, l’ennemi invisible, sous chaque ligne de son travail sur Kafka, jusqu’à sa première rédaction en 1934.
Un échec « épique », précise Walter Benjamin, puisque Kafka propose une virulente critique du mythe dans l’histoire de l’Occident. Kafka utilise une langue semblable à celle du Jugement dernier : « Les paraboles de Kafka […] ne se sont pas contentées de se coucher aux pieds de la doctrine, comme le Haggada aux pieds de la Halaka. Une fois couchées à ses pieds, elles ont soudain levé une patte puissante contre elle ». Et l’on comprend que ce portrait commence à ressembler à un autoportrait. Puisque, comme dans les anciens bestiaires, Kafka plonge dans le monde animal pour en extraire une critique féroce et distanciée contre le pouvoir : « L’animal réagit comme un monsieur distingué qui échoue dans une taverne de bas étage et, par pudeur, renonce à essuyer son verre ».
Développée avec obstination pendant dix ans, l’analyse de Walter Benjamin est à la fois impitoyable et subtile, malgré les obstacles ou les contrastes avec Bertolt Brecht (pour qui Kafka est un bolchévique prophétique) et Gershom Scholem (« Tu es allé trop loin dans ton exclusion de la théologie et tu as jeté le bébé avec l’eau du bain ») qui l’accusent de trop s’éloigner de la critique « officielle ». Walter Benjamin persévère à donner une forme cohérente à un essai qu’il ne parvient pas à achever (« Je ne veux pas conclure ») et qu’il voudrait structurer comme un album, une récolte d’images. Cette anthologie, dépourvue de tout encadrement philologique, est la traduction de l’édition allemande dirigée par le philosophe Hermann Schweppenhäuser (1928-2015). Elle est ici parfaitement traduite, éditée, présentée et augmentée par Christophe David et Alexandra Richter. Le livre se divise en six sections : des articles publiés dans la presse ou conçus pour la radio ; l’essai sur Kafka de 1934 ; l’article sur le Kafka de Brod de 1938 ; des passages de lettres sur Kafka ; des notes ou plans sur Kafka (1928-1939) ; des passages des œuvres benjaminiennes mentionnant Kafka.
Walter Benjamin imprime à Franz Kafka une urgence telle que le texte retrouve sa quatrième dimension, sa présence gestuelle, sa physicalité dramatique. Pour Kafka, comme pour Benjamin, la littérature est la seule réalité valable : « Il s’avère qu’il a vécu à Prague dans un milieu de journalistes médiocres, d’hommes de lettre frimeurs et que, dans ce monde, la littérature était la réalité principale sinon la seule ». Contretemps, contre-espace, Kafka revient à nous : « Il existe un portrait de Kafka enfant réalisé dans un de ces ateliers du XIXe siècle, entre chambre de torture et salle du trône. Le garçon, d’environ six ans, tient la pose dans une sorte de jardin d’hiver, vêtu d’un costume trop serré, dans sa main gauche un chapeau surdimensionné à large bord, comme ceux que portent les Espagnols. Un regard infiniment triste domine le paysage qui lui est destiné, un paysage de fond duquel la conque d’une oreille démesurément grande est collée pour écouter.
Chez Kafka et Benjamin réside une infinie quantité d’espoir, mais elle n’est pas pour nous
Erika Martelli est docteur en anthropologie à l’EHESS et maitre de conférence auprès de l’université de Parme (Italie). Ses recherches portent sur les formes du sujet et du quotidien dans les narrations du XXe siècle. Elle vient de publier Pour une poétique de l’échec (Edicta, 2010).
Le monde n'étant que bruit et terreur, je suis revenu à Montaigne. Quand le monde s'affole, revenez à la sagesse de l'auteur des Essais !
Je conseille cette lecture au Hamas et à quelques autres dictateurs de par la planète, et, accessoirement, à quelques "insoumis", sauf à la Panot, c'est peine perdue...
Michel de Montaigne, c'est le contraire de ces "fous de Dieu" : il tentera une médiation entre Henri de Navarre et le duc de Guise, car, lui aussi il connut le fanatisme religieux...
Mais il prit de la distance : un temps maire de Bordeaux, il se retira dans sa tour, pour écrire et relire les sages de l'Antiquité. Il demeura fidèle au respect des prochains et à une grande modestie, surtout quand il dresse son propre portrait dans son livre unique.
Il était loin de ces hommes de la haine. Il savait cependant que le progrès de l'esprit n'existe pas et que l'histoire de hommes n'est qu'un grand fleuve de sang...
Il mourut, lui aussi, dans ce château ceint de nobles cépages. A partir de 1592, il devint une ruine : souffrances des reins, de la vessie, coliques...il ne sortait plus, ne faisait que quelques pas sur la crête du mur, de plain-pied avec le premier étage...
"Je me connais maintenant, tout déformé et affaibli...", dit-il, à sa faille ou au prêtre accouru, et, à l'instant de la mort, tenté de résister, il eut cette éclair : "Eh quoi, Michel, que t'efforces-tu ?Tu n'as point de besogne à faire ici; on ne t'y demande ni effort ni cérémonie !"
professeur de lettres, écrivain, j'ai publié plusieurs livres dans la région Languedoc-Roussillon, sur la Catalogne, Matisse, Machado, Walter Benjamin (éditions Balzac, Cap Béar, Presses littéraires, Presses du Languedoc...