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6 septembre 2012 4 06 /09 /septembre /2012 13:22

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 Picasso à Perpignan (C) Musée H.Rigaud de Perpignan

 

 

 

  * * L'article du 5 septembre sur la montagne du Madres, confisquée par Groupama ("Formons des GroupàMadres!") vous a plu : j'ai battu le record d'audience de mon blog (plus de vingt mille visites uniques ! ) Merci et bravo ! N'hésitez pas à m'adresser des informations et des commentaires !

   Même si tout le monde ne peut marcher le 30 septembre, du col de Jau au Madres (il y a d'autres événements : salon du livre de Villefranche, festival du disque et BD à Perpignan, soirée Brassens à Sète...), on peut fixer un autre jour et se regrouper : contactez pour pour cette balade, merci (06.31.69.09.32)

 

 

 

***  Ma ville

 

Ma ville à moi, elle est bedonnante de couleurs, de boutiques et de filles maillolesques. Je la connais par cœur, et par le corps. J'y suis né, un chaud matin d'été. Je la connais surtout par les yeux, et par les pieds: chaque jour, je la sillonne par ses ruelles historiques, je la visite lentement, oisif, quêteur de spectacles populaires, en attente de visages. Je sens qu'elle veut me dire qu'elle aussi me connaît et je l'entends murmurer dans la voix grave de ses pavés…

 

Je la préfère le matin, à la montée des lumières, depuis les teintes floues des heures indécises jusqu'au franc soleil de midi. Cette longue gradation, c'est un théâtre pour l'œil. Comme si, dans les globes oculaires, un petit bonhomme faisait l'ascension d'une échelle minuscule. Alors cette image de grenouille qui monte, qui monte, ce mot de grenouille se superpose à un autre vocable, de sonorité voisine: gargouille! En effet, ma ville, ma vieille cité catalane est le domaine des gargouilles, sans doute parce que, ici, les pluies, priées, espérées longuement, ne naissent que dans la violence la plus extrême et sont qualifiées de catastrophes. En fonte, en plomb, en terre ou faïencées, ces gargouilles à l'obscène béance ou à gueule de monstre, sont omniprésentes, à hauteur des pieds prudents du passant, dans le quartier de la Révolution française et dans l'architecturale rue Pams, qui, depuis la place Rigaud, mène à la déception d'un quartier Saint-Jacques inabouti, synonyme de peur et de ghetto.

 

 

 Puis le regard s'élève, vers les façades ocres, les balcons ouvragés, mêlant le noir des fers forgés au rouge des géraniums. Et quand le visiteur rencontre les statues du sculpteur de Banyuls, il devient l'amant de la beauté avec la Vénus de La Loge et tombe amoureux de l'idée avec La Méditerranée du patio municipal. Il peut alors avoir aussi une  pensée pour ces fantômes de bronze, qui, naguère, hantèrent les jardins et les vestibules du Palais des Rois de Majorque, et ne songent qu'à y revenir.  Enfin si l'art et le hasard vous conduit jusqu'au musée Rigaud, vous vous dites que cette ville vous mieux qu'un hôtel étriqué et que Hyacinthe -en dépit de son statut de peintre officiel pour un monarque centralisateur- pourrait amplement devenir le symbole de la cité catalane…

 

Les habitants de ma ville ont la rue des épices, des fromages, des poissons, des olives et des anchois; ils apprécient la libération des avenues, rêvent à des ramblas conviviales et piétonnières, à une danse urbaine permanente, entre mer et neige, marinade et tramontane, gargal et sirocco. Ils veulent aussi reconquérir l'ancienne bibliothèque aux tableaux pompiers, au faste désuet, à l'inattendue trouée lumineuse de sa cour intérieure: l'intelligence et la connaissance s'y concentraient mieux que dans la récente machinerie sans âme. Pour l'instant, le peuple de ma ville se contente de l'anguille, abrupte comme la montée du Carlite. Il se plaît dans la rue de la farine, où discourt l'énergie, dans l'anachronique rue des amandiers,; il ose la fébrilité des commerces en empruntant la fusterie, l'argenterie, l'ange, la rue Saint-Jean, la rue Louis-Blanc, pour aboutir à la nostalgie des remparts, résumés à la fierté du Castillet. Enfin, plus intime, voici les fabriques-couvertes, galerie de linges et de laideur, que les bodegas, avec patience, arrivent à idéaliser…

 

(à suivre...)

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  • professeur de lettres, écrivain, j'ai publié plusieurs livres dans la région Languedoc-Roussillon, sur la Catalogne, Matisse, Machado, Walter Benjamin (éditions Balzac, Cap Béar, Presses littéraires, Presses du Languedoc...
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