Casser les mythes et les mystifications
J'ai été sensible au commentaire de Grég Tuban (article ci-dessous) nuançant l'accueil reçu par la France et le département du 66, à l'occasion de la Retirada (retraite, exode, exil) des Républicains espagnols (et catalans), début 1940.
On peut ajouter des faits qui ne sont pas en général, évoqués ici, en Catalogne du Nord, et passés sous silence par des Catalans, dont les parents ont été peu solidaires à l'égard d'autres Catalans, chassés de Barcelone : la réunification, même symbolique des deux Catalognes devraient d'abord dissiper ces malentendus, analyser ces heures troubles et dire, simplement, la vérité historique ! Ainsi,
-cette foule a été parquée dans des "camps" (sur les plages du Roussillon), dans l'Ariège (Le Vernet), la Haute-Garonne...insalubres, etc...
-certains Espagnols échapperont à l'enfer de la chaleur, de la famine et de la promiscuité : les femmes enceintes grâce à la Croix-Rouge suisse (maternité d'Elne), grâce à des proproértaires terriens qui ont recruté ainsi une main-d'oeuvre facile...
-les réfugiés qui avaient quelques biens sur eux ont pu obtenir de la bonne nourriture (des bijoux contre des légumes, des agriculteurs des P.O. profitant ainsi de la détresse de ces pauvres gens)
-les douaniers qui ont filtré les exilés à la frontière se sont souvent emparés de biens d'individus qui ont tout laissé derrière eux...
-les agents de la Sncf ont acheminé les exilés les plus dangereux (!), juifs, gitans, révolutionnaires, anarchistes...vers d'autres camps, plus lointains, de la mort...
Nous avons lu les "camps de la honte", et cet "accueil" fut une véritable honte ! Il est, à présent, aisé, d'avoir bonne conscience et de critiquer les Français et les responsables de l'administration, qui, à l'époque, ont agi ainsi ! Donneurs de leçons, intellos de papiers, révolutionnaires virtuels, romanciers pour "France Loisirs", quoi de plus facile et de plus confortable, depuis nos fauteuils ou derrière les écrans de nos ordinateurs...
Chacun, s'il est honnête, doit se demander : "Et moi, qu'aurais-je fait en 40..?"
* Article de G.TUBAN : Début de polémique suite aux propos d'Harlem Désir sur les Républicains espagnols
Les réfugiés espagnols de 1939 «fiers de la solidarité de la France» ? La déclaration d'Harlem Désir sur le plateau de France 2 n'est pas passée inaperçue auprès des républicains espagnols et de leurs descendants. Verbatim : «Juste avant cette émission, j’étais à Montreuil où nous organisions une réunion de solidarité avec le peuple malien et j’ai vu des hommes et des femmes, beaucoup de Maliens de France, qui étaient à la fois inquiets, pour leur pays, comme ont pu l'être des réfugiés, vous savez, des Espagnols ou autres qui ont été accueillis en France au moment où leur pays traversait des drames et des guerres, et qui en même temps étaient fiers de la solidarité de la France, qui étaient soulagés, qui étaient reconnaissants».
Entre incompréhension et indignation, les commentaires n'ont pas tardé à fuser sur le web à l'image du président de l'Association pour le Souvenir de l’Exil Républicain Espagnol en France (ASEREF), Eloi Martinez Monégal, qui accuse le premier secrétaire du PS de «vouloir réécrire l'histoire» en précisant à juste titre que "s’il y a eu en France solidarité à l’égard des réfugiés espagnols, elle venait du peuple français et non pas des autorités gouvernementales de la troisième République".
De l'Amicale des Anciens Internés Politiques et Résistants du camp de concentration du Vernet d'Ariège à l’Amicale des Anciens Guerilleros Espagnols en France, les réactions scandalisées sont unanimes.
Effectivement, si l'on peut discuter de la politique d'intégration post-guerre des réfugiés républicains espagnols en France, leur «accueil» à l'hiver 1939 dans des camps provisoires dont certains n'en auront que le nom (Argelès, Le Barcarès...) n'est pas un exemple à citer lorsque l'on veut parler de solidarité nationale envers des étrangers alors considérés comme "indésirables".
Les descendants de Républicains espagnols auront à coeur de rappeler à Harlem Désir que sous la 3° République, la France a procédé à des rapatriements forcés vers l'Espagne franquiste de femmes et d'enfants ou que furent mis à l'isolement dans des camps disciplinaires (Collioure, Le Vernet...) des «suspects» sans aucun jugement.
De citer la longue liste des camps français en 1939 et le nombre hallucinant de réfugiés internés (plus de 330.000 espagnols sont passés dans les camps des Pyrénées-Orientales suite à la Retirada*).
De lui préciser que le premier convoi de déportés sur l'Allemagne nazie est un convoi de 900 Espagnols partis d'Angoulême le 20 août 1940 pour Mauthausen... D'évoquer les livraisons de suspects aux autorités nazies ou franquistes sous Vichy, les déportations sur les camps d'Afrique du Nord, ces camps où certains espagnols croupissaient encore en 1942...
La déclaration d'Harlem Désir peut donc surprendre par son raccourci historique confondant politique d'accueil - qu'aucun historien ne pourra juger «solidaire» en 1939 – et d'intégration à moyen et long terme. Un manque de connaissances au sujet de réfugiés espagnols de la Retirada - dont un grand nombre se sont battus pour la libération de la France - dont l'histoire reste encore en souffrance.
* En juin 1939, la préfecture des Pyrénées-Orientales estime à 500.000 personnes le nombre de réfugiés à être rentrés en France lors de la Retirada. Ce rapport fait état du passage de 330.000 réfugiés dans les camps des P.O. et du transfert de 170.000 civils vers les différents départements. (source ADPO)
Le 24 janvier à 17h33 par Grégory Tuban
** Pour information :
Mémoriaux / Musées
http://www.memorial-caen.fr/portail/index.php
http://www.memorialdelashoah.org/
http://www.cg66.fr/culture/memorial/index.html
Musée Mémorial du Camp de Rivesaltes
Musée de la Junquera sur la guerre civile et la Retirada
Camps d’internement
L'Association Philatélique de Rouen et Agglomération présente une étude historique sur les camps d'internement français.
Camp de Gurs (Pyrénées Atlantiques)
Associations généralistes pour la mémoire des républicains espagnols
- Sites français
Site des enfants et petits enfants des exilés de la guerre civile Espagnole qui veulent recueillir en marge de l’histoire officielle, contre l’oubli, la part de mémoire vivante qui tisse les liens d’un peuple.
Acer : L'association des amis des combattants en Espagne républicaine
L’un des sites français les plus riches quant au contenu informatif et des plus émouvants avec des témoignages de familles de républicains et de réfugiés espagnols
Ce site concerne l'exil des réfugiés juifs en Europe. En suivant le fil du destin particulier d’un individu ou d'un petit groupe, on éclaire les caractéristiques du monde qui l’entoure.
- Sites espagnols
Un site en anglais et espagnol très documenté sur la Guerre Civile Espagnole
http://www.portaldelexilio.org/
Site espagnol de la Fondation Jaime Vera portant notamment sur l’exode des enfants envoyés en Russie, au Mexique et en Belgique.
http://www.sbhac.net/Republica/Imagenes/ImGCe.htm
Site espagnol de la SBHAC : Sociedad beneficas de historiadores aficionados y creadores.Un site très complet couvrant de nombreux thèmes : la guerre civile, l’exil, le rôle de l’armée, les femmes dans la guerre, le rôle de l’art, les enfants…Avec d’innombrables photos.
Les structures institutionnelles pour la mémoire
http://www.foroporlamemoria.info/
Site du gouvernement espagnol pour la récupération et la réhabilitation des républicains espagnols assassinés par les franquistes.
http://www.histoire-immigration.fr/
L’établissement public de la Porte Dorée est chargé de rassembler, sauvegarder, mettre en valeur et rendre accessibles les éléments relatifs à l’histoire de l’immigration en France, notamment depuis le XIXe siècle et de contribuer ainsi à la reconnaissance des parcours d’intégration des populations immigrées dans la société française et de faire évoluer les regards et les mentalités sur l’immigration en France.
Un site très complet de la Mairie d’Argelès sur la Retirada dans le département.
Les sites culturels
Vous trouverez sur ce site des parcours sonores avec interviews de témoins ayant vécu la Retirada.
Site du sculpteur Serge Castillo créateur de statuettes en terre cuite de réfugiés espagnols.
Site de l’association qui consacre son prochain festival de cinéma au thème de l’Exil
Site du célèbre festival de cinéma de Montpellier du 25 octobre au 3 novembre qui fait une large place à l’ Espagne et à la guerre civile avec un hommage à Jaime Camino, des expositions, des films sur la guerre civile.
http://orpheus.ucsd.edu/speccoll/tsdp/
Une collection de dessins d’enfants faits au cours de la guerre civile par des orphelins et des réfugiés.
Bibliographie de l’exil républicain espagnol en France
Les sites plus politiques
Site retraçant l’histoire du Poum. (Parti Ouvrier Unifié Marxiste)